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À la une Conseil municipal Valérie Faucheux

Présidentielles : abordons les vrais sujets

[Conseil municipal du 20 mars 2017]

Chaque conseil municipal débute par une intervention de chacun des groupes politiques. L’occasion de nous exprimer sur le climat politique national actuel… et de rappeler que face aux dangers de l’extrême droite et de la droite extrême, les citoyens doivent être au plus près de la décision politique.

 

 

Conseillère municipale

Intervention de Valérie FAUCHEUX au nom du groupe écologiste

citationLa semaine dernière, Monsieur Plouvier vous vous êtes exprimé dans la presse. Sans doute une manière facile d’attirer les projecteurs sur votre formation, plus facile que d’avancer des idées nouvelles et fédératrices. Vous avez déclaré que « le parrainage des élus socialistes rennais à Benoit Hamon ne renvoie pas une bonne image de notre territoire ».  Étonnante saillie d’un représentant politique qui a fait le choix de parrainer un candidat mis en examen, qui bafoue l’institution judiciaire et qui discrédite la fonction d’élu.

 

Et au-delà des démêlés judiciaires de votre champion, nous ne pensons pas que son programme s’inscrit réellement dans le développement des territoires et des habitants de notre pays. La suppression annoncée de 500 000 emplois publics nuira forcément  à Rennes, siège des principaux services déconcentrés de l’État pour la région Bretagne et où les deux principaux employeurs sont l’hôpital et les services de la Ville. Et ces 20 milliards d’euros d’économie dans le domaine de la santé pèseront directement sur les revenus des ménages qui devront assumer leurs dépenses de santé.

 

Oui nous sommes inquiets pour notre territoire mais pas pour les mêmes raisons que celles invoquées par Monsieur Plouvier.

Les trois têtes d’affiches en tête dans les sondages pour cette élection présidentielle proposent des programmes qui comportent des mesures graves qui auront un impact direct sur notre territoire et la majorité de sa population.

Les obsessions de réductions des dépenses publiques se feront au détriment des collectivités locales. Après deux quinquennats de diminution des dotations, on nous annonce encore 20 ou 11 milliards de moins. Couplés à la promesse d’exonérer 80% des ménages de la taxe d’habitation. Comment financerons-nous le Plan Local de l’Habitat,  les écoles, les crèches, les équipements sportifs…? Et pourtant il faudra construire des crèches car la suppression des 35 heures et l’augmentation du nombre de dimanches travaillés augmenteront automatiquement les besoins de garde des enfants et ce d’autant plus pour un territoire comme le nôtre, attractif pour les jeunes ménages.

La taxe d’habitation est certes un impôt injuste : les citoyens des communes pauvres paient plus que ceux des communes riches. Mais la solution réellement progressiste consisterait à l’asseoir sur le revenu des ménages et sur la valeur locative actualisée des biens immobiliers, en l’assortissant de puissants mécanismes de péréquation fiscale entre les communes.

Il est étonnant d’entendre ces candidats prompts à casser le droit du travail et toutes les protections pour uberiser l’économie, ériger la valeur travail comme horizon indépassable. Ces discours créent le désenchantement, font craindre le déclassement, attisent toutes les angoisses et sont le véhicule des idéologies les plus réactionnaires conduisant aux succès partout en Europe des partis d’extrême-droite.

 

Cette campagne présidentielle ne s’est pas saisi – ou trop peu – des débats qui intéressent réellement nos concitoyennes et nos concitoyens. Ces programmes oublient une grande partie de la population, celle qui vit avec de faibles revenus, parfois en dessous du seuil de pauvreté. Rappelons-nous que plus de 28 000 ménages vivent avec des bas revenus sur Rennes Métropole.

Ces programmes sont la plupart vides de proposition pour les jeunes, qui représentent 40 % des habitants de notre ville.

 

Non, seules sont ressassées les vieilles recettes, mises en œuvre depuis tant de décennies et ayant pour seule ambition de défendre un système financier  toujours plus violent. Vieilles recettes austéritaires et sécuritaires qui n’ont finalement servi qu’à aggraver les clivages sociaux et à donner le FN comme possible vainqueur de la prochaine élection. Et j’en veux pour preuve la réapparition dans nos rues, à Rennes même, de groupes que l’on croyait relégués aux oubliettes d’une histoire pourtant pas si lointaine. Au début du mois, une vingtaine de nervis du GUD se sont attaqués à une manifestation de soutien aux sans-papiers. Un mois auparavant, en marge d’un match de foot Rennes-Nantes, c’étaient plusieurs dizaines d’individus d’extrême-droite qui s’en prenaient à des consommateurs de la rue Saint-Michel. Comme nous l’exhorte à nous le rappeler Bertold Brecht dans La Résistible Ascension d’Arturo Ui,  « Le ventre est encore fécond, d’où a surgi la bête immonde. »

 

En tant qu’élu-e-s nous avons une responsabilité face à ces dangers qui menacent la démocratie.

Et nous ne sommes pas désarmés. Mais les mesures que proposent messieurs Fillon et Macron, madame Le Pen et les quelques autres petits candidats à l’élection présidentielle clairement ancrés à la droite extrême ne sont pas les bonnes.

 

Il nous faut au contraire prendre à bras le corps la nécessaire mutation économique et l’adosser à la tout aussi nécessaire transition écologique. Cette transition vecteur d’innovation est possible et finançable. On le sait désormais, l’Économie Sociale et Solidaire, pour ne citer qu’elle, est capable, d’ici 2020, de générer un million d’emplois « de bonne qualité » localisés sur nos territoires dans des secteurs aussi variés que les énergies renouvelables, la rénovation des bâtiments, l’agroécologie, les transports durables, la réparation et le recyclage, mais encore l’éducation ou l’accompagnement des publics en difficulté.

 

Repenser la protection sociale et les solidarités  est aussi impératif. La protection sociale inventée début du 20ème siècle et mise en œuvre en 1945 par la création de la Sécurité Sociale doit être refondée afin de prendre en compte de nouvelles questions. Aujourd’hui, les jeunes sont les oubliés du système. Entrant plus tardivement qu’avant sur le marché du travail et bien souvent par des contrats extrêmement précaires, ils ne bénéficient d’aucune protection, d’aucun revenu.  De même, il ne protège pas mieux la fin de vie et omet de prendre en compte la perte d’autonomie de nos aînés.

 

Repenser le modèle social, c’est aussi repenser la répartition du temps de travail. Et là encore, nous le réaffirmons : les 32 heures/semaine sont l’objectif à atteindre. Augmenter le temps de travail, autoriser le travail dominical n’est en rien créateur de richesse ou même de lien social.

 

Enfin, face au danger de l’extrême droite et de la droite extrême, les citoyens doivent être au plus près de la décision politique. Il ne s’agit pas de remettre en cause la délégation dont dispose l’élu par son élection au suffrage universel, un système de révocation pur et simple serait contre-productif et offrir un champ libre au populisme le plus terrible. Cependant, l’élu-e ne peut plus être le seul acteur de la démocratie. Associer le citoyen à la décision politique est au contraire gage de démocratie. Ici, à Rennes, la Fabrique citoyenne et le budget participatif ont montré combien les habitantes et les habitants étaient prêts à prendre en main le fonctionnement de la vie publique.