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Améliorer durablement la qualité de l’eau

CONSEIL MÉTROPOLITAIN DU JEUDI 29 SEPTEMBRE 2022Intervention portée par Valérie Faucheux sur la délibération n°23 : « Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (GEMAPI) – Taxe GEMAPI – Institution à compter du 1er janvier 2023 et fixation du produit de la taxe 2023 »

Les chiffres, nous les connaissons désormais par cœur et ils ne sont pas bons : 3 % des masses d’eau en bon état à l’échelle du département, 0 % à l’échelle de la métropole. Et nous devrions viser 29 % dans 5 ans en Ille-et-Vilaine… autant dire, presque mission impossible.

Alors, nul doute que l’instauration de la taxe GEMAPI et les deux millions d’euros par an de recettes perçues vont nous aider à améliorer la situation. C’est pourquoi nous la voterons. Mais disons-le d’emblée, on ne peut être satisfait malgré tout de créer une nouvelle taxe. Parce que les habitant·e·s, en tant qu’abonnés du service de l’eau, paient déjà une redevance à l’Agence de l’eau. Et qu’une partie des recettes de cette redevance doit précisément financer les actions de reconquête de la qualité des eaux. Rappelons que les consommateurs financent ainsi à peu près 60 % du budget de l’agence de l’eau, contre 11 % seulement pour les auteurs mêmes des pollutions. Cerise sur le gâteau, les agences de l’eau ont vu une partie de leur enveloppe régulièrement ponctionnée par les gouvernements successifs, pour équilibrer les budgets en 2014 ou pour renflouer d’autres acteurs environnementaux en 2018. Donc, charge, une nouvelle fois, au contribuable de combler les trous dans la raquette. Où est la justice sociale d’une telle mesure ? Qu’en est-il du respect du fameux principe pollueur-payeur ?

L’état de nos masses d’eau est critique. Si des facteurs géographiques (le manque de relief pentu qui augmente la stagnation des masses d’eau) et météorologiques (les sécheresses à répétition des derniers étés) peuvent l’expliquer, il nous faut revenir à la racine du problème si nous voulons réellement améliorer leur qualité. Je veux évidemment parler des activités humaines qui perturbent le cycle de l’eau sur notre territoire.

L’artificialisation intensive des sols ces 50 dernières années sur la partie amont de la Vilaine, l’augmentation des prélèvements en eau par de nombreuses industries fortement consommatrices, l’utilisation importante d’intrants chimiques par l’agriculture, la transformation de la morphologie des rivières et ruisseaux par le remembrement… ce cocktail destructeur a entraîné un appauvrissement biologique radical des milieux aquatiques brétilliens. Et, par conséquent, une perte de qualité de l’eau dont nous pâtissons aujourd’hui.

C’est donc d’une vision intégrée, systémique de la protection de la ressource dont nous avons besoin, à l’échelle nationale, régionale et locale, et pas (seulement) d’actions curatives qui viennent réparer tant bien que mal en aval les dégâts générés en amont. Comme peuvent en témoigner nos collègues élus qui siègent à la Collectivité Eau du Bassin Rennais, aux instances de l’Établissement Public Territorial du Bassin de la Vilaine, à Commission Locale de l’Eau du Sage Vilaine, des actions concrètes sont menées et vont être amplifiées par ces nouvelles recettes comme la replantation de haies, le reméandrage des cours d’eau, la reconstitution de zones humides, l’accompagnement des agriculteurs vers des pratiques plus durables (Exemple la labellisation Terres de Sources). Tout cela va dans le bon sens. Mais, gare au syndrome du tonneau des Danaïdes si nous n’agissons pas à la racine des problèmes. 

Pour restaurer la bonne qualité de nos eaux et atteindre nos objectifs fixés par la Directive Cadre Européenne de l’eau en 2027, il nous faut au moins actionner deux leviers. 

Le premier, c’est un changement drastique de modèle agricole. Nous ne pouvons continuer à gaspiller ainsi des millions via la Politique Agricole Commune, en donnant d’une main 20 euros aux organismes de l’eau pour tenter de réparer les dégâts, tout en continuant de donner 100 euros d’argent public à de grandes exploitations agricoles dont la production dopée aux intrants est vouée à l’exportation ou à l’alimentation animale. Nous voulons au contraire un modèle agricole qui conduise les agriculteurs qui n’ont pas encore franchi le pas, à ne plus polluer notre eau, à ne plus polluer nos sols et notre air avec les rejets d’ammoniac, à produire des aliments sains et élever des animaux respectés, et enfin retrouver leur fierté. Un modèle qui soutient les professionnel·le·s vertueux dans le cadre du principe pollueur-payeur. Notre Projet Alimentaire Territorial va évidemment dans ce sens, mais il faudrait que les politiques régionales, nationales et européennes aillent dans le même sens pour parvenir à nos objectifs. Tel n’est toujours pas le cas.

Ensuite, il nous faut aussi revoir notre modèle de développement urbain. Limiter drastiquement l’étalement et la consommation de nouvelles terres, questionner l’utilité et les impacts de chaque nouveau projet d’aménagement périurbain, renaturer autant que possible les espaces déjà artificialisés. Avec l’inscription du principe du Zéro Artificialisation Nette dans nos politiques d’aménagement, nous entérinons le principe que le renouvellement urbain doit progressivement devenir à horizon 2030 la norme, et l’étalement l’exception. Nous avons pris des engagements forts au niveau local en ce sens, qui vont se traduire prochainement par l’adoption de notre nouveau Programme Local de l’Habitat et la modification du PLUi. Mais Rennes Métropole n’est pas un îlot isolé dans le département, et les masses d’eau n’ont que faire de notre découpage administratif. Relever le défi de la qualité de l’eau sur Rennes Métropole passera donc par des coopérations renforcées entre territoires à l’échelle du bassin versant, pour créer un cap et une ambition partagés sur ces sujets.

– Seul le prononcé fait foi –