Dans la majorité des pays l’école assure deux missions, celle la plus évidente de la transmission des savoirs mais également la socialisation et plus largement l’éducation à la vie en collectivité, à la découverte de l’autre dans sa diversité et des règles pour bien vivre ensemble.
Des études convergentes montrent que les espaces scolaires ne sont jamais neutres mais qu’ils « transmettent des messages à leurs usagers » (De Botton, 2013) et qu’ils sont « porteurs consciemment ou non de valeurs politiques et sociales » (Baylac, 2020). La cour d’école est l’un des premiers espaces sociaux dans lesquels les enfants évoluent et se construisent leur représentation du monde. Les interactions qui s’y développent sont donc importantes pour leur construction présente et future.
Les aménagements de cour ont longtemps été considérés comme secondaires mais c’est pourtant dans cet espace que se croisent filles et garçons de différentes classes d’âge et d’intérêts et de besoins différents et où peuvent se jouer aussi des rapports de force entre filles et garçons, entre petits et grands.
Le travail de réaménagement des cours d’école a donc débuté à Rennes autour du constat partagé d’une inégalité d’appropriation de ces espaces sociaux par les enfants, notamment entre les filles et les garçons. Dans le cadre d’une réflexion plus large sur la place des femmes dans l’espace public, la cour d’école s’est imposée à nous comme celui sur lequel il nous fallait agir afin de poser un cadre favorable à l’égalité entre filles et garçon mais également entre enfants de façon plus générale, afin que chacun et chacune y trouve sa place.
La renaturation des cours d’école avec une désimperméabilsation des sols et une végétalisation massive s’est également imposée à double titre. Tout d’abord pour répondre à un enjeu évident de lutte contre les îlots de chaleur et d’adaptation de la ville au réchauffement climatique qui n’épargne plus aucune région d’Europe, il n’est pas nécessaire de développer en ce 9 octobre où nous connaissons des températures quasi estivales. Il s’agit également de favoriser la biodiversité et de lutter, par la présence de la nature dans les écoles, contre ce qu’on appelle le « syndrome de manque de nature » ou l’éloignement des enfants, notamment en milieu urbain, des bienfaits de la présence physique d’une nature vivante dans leur environnement quotidien. C’est aussi ce que le philosophe Baptiste Morizot appelle « la crise de la sensibilité » au vivant soit « un appauvrissement de ce que nous pouvons sentir, percevoir, comprendre, et tisser comme relations à l’égard du vivant », cette crise étant selon lui « conjointement un effet et une part des causes de la crise écologique qui est la nôtre ».
Ainsi les cours d’école minérales, pensées pour leur facilité d’entretien, pour pouvoir surveiller les enfants aux quatre coins, pour ne pas trop salir les pantalons et les mains, se redécouvrent territoires de jeux, de redécouverte de la matérialité des saisons et de la présence de la nature mais aussi d’usages pédagogiques par les enseignants. Ex. école Ille élémentaire.
L’expérience nous montre aussi que ces cours végétalisées sont propices à une diminution des conflits entre enfants par la diversification des activités qu’elle permet et donc à un climat scolaire apaisé. La nature se fait donc ici l’allié de l’égalité, en plaçant au centre du projet le bien-être des enfants, en cohérence avec les objectifs de notre nouveau Plan Éducatif Local.
Je me fais d’ailleurs ce soir la porte-parole d’un travail collectif entre élu.e.s mais aussi entre services au bénéfice des enfants rennais. Ce dossier de la renaturation des cours d’écoles est porté avec passion et savoir-faire par la Direction Éducation Enfance et par la Direction des jardins et de la Biodiversité tant dans la concertation des usagers que la conception jusqu’à la réalisation matérielle de ces cours.
Je tiens à remercier mon collègue Didier Chapellon, adjoint à la biodiversité ainsi que les équipes de la DEE et de la DJB, en particulier les équipes périscolaires impliquées ainsi que Carine Chénel mais aussi Bruno Laperche et tous les agents de la DJB qui contribuent à la réalisation concrète de notre politique éducative et de transition de notre Ville.
Ce référentiel est la matérialisation de notre ambition et permet de poser un cadre de discussion avec les différents acteurs concernés.
Présentation rapide des slides :
Slide 1 puis 2 : Concrètement, la Ville est dotée de 385 000 m2 de cours répartis sur 87 écoles. Sur ces 87 cours, toutes ne sont pas au même niveau de végétalisation. Les services jardin et biodiversité ont effectué un classement et un ordre de priorisation en fonction du degré de végétalisation des cours et de l’environnement proche.
Ce sont environ 6000 m2 de cours végétalisés chaque année, soit l’équivalent de 2 ou 3 cours qui sont renaturées.
Slide 3 : comme je vous l’ai indiqué ces aménagements sont le fruit d’un projet global travaillé pendant un an et demi avec les usagers avant la réalisation à l’été suivant.
La nature est au cœur de l’aménagement au sens propre, comme au figuré.
Slide 4 : je ne détaille pas les grands enjeux que j’ai évoqués précédemment et que vous pouvez voir sur cette slide.
Slide 5 : Le principe d’intervention est simple : « tout végétaliser sauf… »chaque espace qui ne donne pas lieu à une végétalisation doit être justifié, soit par un usage pédagogique, soit pour des raisons de sécurité ou de circulation, d’entretien, etc.
Slide 6 : 3 indicateurs que nous améliorons et pour lesquels nous posons une exigence de résultat : un coefficient de couvert arboré (ou de canopée) égal ou supérieur à 30 %, une gestion totale des eaux pluviales à la parcelle avec au moins 50 % d’espaces végétalisés et un réemploi de matériaux d’au moins 60 % (mobilier, les assises, les pavements)
Slide 7 : avec pour objectif toujours la diversification des activités entre dépense physique et pratique sportive, temps calmes et d’échanges entre enfants, observation de la nature mais aussi le développement, notamment pour les petits, des sens et des facultés psychomotrices. Les cours doivent favoriser les déplacements fluides, des interactions plus diversifiées et développer l’imaginaire.
Slide 8 : c’est aussi la particularité de notre démarche qui est explicitée ici. C’est une démarche réalisée totalement en régie, par nos services, qui met l’accent sur la dimension participative de ces projets qui doivent fédérer enseignants, enfants et équipes périscolaires sans oublier les concierges et les agents d’entretien.
Slides 9 – 20 : quelques exemples avant / après qui vous donnent à voir qu’il n’y a pas deux projets identiques en fonction du travail de concertation menée dans chaque école.
Je vous remercie de votre écoute.