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Contre l’extension de la ZAC du Hil 3 : pour la densification des zones d’activité, pour la maîtrise publique du foncier économique, pour la préservation des espèces protégées

Conseil métropolitain du jeudi 11 mai 2023 – Intervention portée par Valérie Faucheux au nom des élu·e·s écologistes et citoyen·ne·s sur la délibération n°9 : Aménagement opérationnel – Noyal-Châtillon-sur-Seiche – Site le Hil 3 – Projet de création d’une Zone d’Aménagement Concerté – Dossier de réalisation – Programme des Équipements Publics – Approbation

Les écologistes défendent un développement économique créateur d’activités et d’emplois dans le respect de l’humain et de l’environnement. Ainsi, nous sommes tout à fait conscients de la nécessité pour notre métropole de fournir du foncier aux entreprises pour déployer leurs activités. Mais dans un contexte de dérèglement climatique brutal, de nécessaire préservation du foncier et de la biodiversité, la constitution de Zone d’activité aujourd’hui ne peut plus se faire de la même façon qu’hier. 

Concernant la ZAC du Hil, nous reconnaissons certaines avancées dans le projet d’extension.

Comme nous l’avions déjà dit il y a un an, nous soulignons plusieurs indicateurs positifs sur l’aménagement de cette nouvelle zone : la préservation des haies bocagères, de la douve sud-ouest accueillant des amphibiens et du bosquet central, ainsi que l’attention aux mobilités douces pour la desserte du site.

En cohérence avec les orientations du futur Schéma d’Aménagement Économique, et la nécessité de promouvoir des ZAC décarbonées et productrices d’énergie, nous saluons également les orientations présentées en commission de développement économique en matière de production d’énergie photovoltaïque sur la zone du hil 3. Cela se traduira par une production sur site, le développement d’une boucle d’autoconsommation collective ou encore l’obligation d’installer des panneaux sur les toits des futures constructions ou en ombrières de parkings.

Nous nous réjouissons également d’une attention portée à la construction de bâtiments d’activités à partir de matériaux issus du réemploi ou biosourcés.

Pour autant, malgré ces améliorations du projet qui vont dans le bon sens, les garanties nous paraissent encore insuffisantes en matière de densification, de maîtrise publique du foncier économique et de préservation des espèces protégées.

D’abord, le sujet de la densification.

Il y a un an, nous nous étions abstenus sur ce dossier pour laisser place à un travail commun sur ce dossier. Force est de constater que ce travail n’est pas allé au bout des actions qui nous semblent impératives aujourd’hui dans la construction des zones d’activités. 

A l’époque, nous avions rappelé l’urgence à préserver les espaces agricoles et naturels, notamment dans le cadre du Zéro artificialisation nette. Nous avions aussi appelé à des engagements concrets sur la densification des zones d’activité du Hil 1 et Hil 2, comme condition nécessaire à l’extension.

Si nous reconnaissons aujourd’hui que le sujet de l’optimisation foncière du Hil est évoqué dans les orientations du projet, nous constatons également que rien n’est réellement formalisé.

Nous n’avons pas à ce stade d’état des lieux précis du potentiel d’optimisation des zones hil 1 et 2 et de plan d’action en ce sens.

Toute étude sur les ZAC existantes ou extension devraient pourtant être conditionnées à une étude de propriété, comme le font la SAFER et l’Etat pour les parcelles agricoles. Autrement dit, il s’agirait d’initier un diagnostic foncier approfondi des zones hil 1 et hil 2 afin de connaître précisément le statut d’occupation de chaque parcelle, leurs perspectives d’évolution et d’identifier les dents creuses.

Le futur Schéma d’Aménagement Économique devra d’ailleurs conditionner toutes les extensions à une densification des secteurs existants.

Par ailleurs, les solutions favorisant la densification dans l’opération d’aménagement de hil 3 ne sont pas évoquées, comme la verticalisation avec la construction de locaux sur plusieurs étages, ou de bâtiments mutualisables (salle de réunion) ou encore la réduction des places de parking par m2.

Autre sujet de déception, la maîtrise publique du foncier.

Depuis longtemps, les élus écologistes plaident en faveur d’une stratégie foncière métropolitaine privilégiant l’acquisition de terrains pour en faciliter la gestion et y favoriser l’installation d’entreprises à fort impact environnemental et social. En effet, dans un contexte où le foncier devient une ressource rare et précieuse, et où la demande est croissante, il semble judicieux que les collectivités publiques puissent conserver la maîtrise de leur foncier économique.

Or, dans le cas de Hil 3, nous ne constatons aucune avancée sur ce sujet. Le modèle promu reste la vente de parcelles viabilisées.

A l’échelle métropolitaine, nous pouvons innover. La création d’une foncière permettrait d’agir en faveur d’une politique d’aménagement durable de notre métropole, favorisant un meilleur pilotage de notre politique économique. Notre métropole pourrait imaginer devenir propriétaire de l’ensemble des terres à vocation économique. Il faut procéder à un travail de chiffrage, mais cela semble réalisable.

Par des baux emphytéotiques ou la mise en place d’un Office Foncier Solidaire économique, dans le même esprit que pour l’habitat, nous pourrions ainsi gérer la mise à disposition de ces espaces tout en en gardant la maîtrise pour le futur. 

Autre outil intéressant issu de l’économie de la fonctionnalité et de la coopération : l’ASL, association syndicale libre, qui permet aux entreprises d’une ZAE de mutualiser des espaces, des parkings ou encore de créer des services communs comme par exemple un service de conciergerie ou un espace de gestion des encombrants. La création de ces ASL pourrait être généralisée à toutes les nouvelles ZAE ou aux extensions des ZAE existantes, à l’image de ce que nous avons fait pour Viasilva.

Ainsi, plusieurs outils innovants pourraient être mobilisés pour améliorer la maîtrise du foncier économique et le fonctionnement de nos ZAE.

Enfin, dernier sujet de dissension : l’impact de l’extension de hil 3 sur la biodiversité et notamment sur les espèces protégées vivant sur le site.

L’inventaire faunistique de la zone du hil fait état de la présence de plusieurs espèces protégées. Quatre espèces de chauve-souris seront fortement impactées par les nuisances sonores et visuelles du chantier de la ZAE puis par les nouveaux usages du site.

Plus problématique encore, le projet prévoit la destruction de l’habitat de deux espèces protégées recensées sur site et dont l’enjeu local de conservation est fort : la vipère péliade et le triton crêté.

La vipère péliade, rare en Bretagne et sur liste rouge à l’échelle nationale, est particulièrement vulnérable. Ses chances de conservation à l’issue des travaux, malgré des mesures préventives, sont faibles : c’est une espèce peu mobile, s’épanouissant dans un habitat très spécifique et ne pouvant facilement en changer.

La demande de dérogation à la destruction d’espèces protégées n’est pas acceptable. L’Etat ne devrait pas y souscrire. Nous avons une responsabilité à préserver le vivant, dont les humains dépendent directement. En cohérence avec la démarche ERC, Eviter-Réduire-Compenser, nous regrettons qu’un autre scénario n’ait pas été envisagé afin de préserver l’habitat de la vipère péliade, celui du triton crêté, ainsi que la zone humide située au sud-est de la zone.

Pour conclure, si l’extension de la ZAE du Hil constituait une option envisageable afin de répondre aux besoins des acteurs économiques, pour nous, elle ne peut se faire sans garanties réelles de densification de l’ensemble de la zone, sans maîtrise publique du foncier et sans mesures fortes de préservation des espèces protégées du site.

Les besoins en foncier des entreprises sont réels, mais un autre modèle d’aménagement économique est possible. A l’aune des enjeux climatiques, de préservation de la biodiversité et de sobriété foncière, il est nécessaire de repenser nos façons d’aménager. Nous pouvons encore faire du Hil le nouveau modèle de ZAE.

Nous pouvons nous inspirer de projets réalisés ailleurs. À Josselin, l’Établissement Public Foncier de Bretagne a accompagné l’EPCI dans la densification de sa ZAE en identifiant et qualifiant les gisements fonciers non optimisés. Au Pays-Bas, un centre de distribution à Ede a fait l’objet d’une opération alliant densification et mixité fonctionnelle : une surface de bureaux de plus de 3000m2 a été développée en étage sur deux entrepôts et 90 places de parking sont proposées sur le toit. 

Il est pour nous urgent d’avancer rapidement sur les outils métropolitains qui nous permettront de déployer du foncier économique dans le respect de nos engagements climatiques et environnementaux, en cohérence avec l’ensemble de nos autres politiques. 

Pour toutes ces raisons, nous voterons contre cette délibération.

Seul le prononcé fait foi