Démocratie locale : on fait le point - Élu·e·s écologistes et citoyen·ne·s

Interview de Xavier Desmots

Nous sommes dans l’optique de développer la capacité des habitant·e·s à agir sur leur quartier et leur ville. Non pas pour gagner la paix sociale, mais bien pour faire société.
Adjoint délégué à la Démocratie locale et à la participation citoyenne, délégué au Quartier Bréquigny

Quel est l’impact de la pandémie de COVID-19 sur la démocratie locale à Rennes ?

Le contexte sanitaire nous a contraints à effectuer les démarches de concertation essentiellement en ligne. Ce fut par exemple le cas pour les concertations sur le plan de circulation Sud-Gare et le nouveau réseau de bus 2021. Nous travaillons à ce que les personnes qui ne sont pas à l’aise avec ces nouveaux outils, ou qui n’ont pas accès au numérique, ne soient pas exclues de ces dispositifs. Nous essayons de faire vivre cette démocratie numérique en animant des temps qui soient les plus conviviaux possibles.

La représentativité de ces instances citoyennes ne reste-t-elle pas malgré tout limitée ?

Nous essayons d’aller vers un public aussi large et varié que possible. Nous souhaitons permettre à chaque citoyen·ne, y compris aux plus défavorisés, de participer pleinement à la société. Cette politique d’inclusion vise à ouvrir notre démocratie locale aux personnes les plus éloignées des décisions politiques. La sélection des participant·e·s par tirage au sort, comme pour la mission 5G, permet de garantir cette diversité.

Comment garantissez-vous que La Fabrique citoyenne soit accessible à tou·te·s ?

Nous travaillons avec le Conseil rennais de la cohésion sociale, le Conseil citoyen et les Conseils de quartier à plus de solidarité, d’égalité et d’inclusion. Nous mettons tout en œuvre pour que les participant·e·s des jurys citoyens puissent monter en compétence et s’approprier les sujets sur lesquels ils devront se prononcer. Le budget participatif des écolier·es et des jeunes, qui va être mis en place, est un très bon outil de travail sur la citoyenneté. Ces démarches participatives sont aussi des outils d’émancipation et de justice sociale.

La démocratie locale : gadget ou révolution ?

Par le passé, les élus n’avaient pas l’habitude de travailler les politiques publiques avec les habitant·e·s. Cela leur a valu quelques loupés qui les a incités à davantage prendre en compte l’expertise des usager·e·s. Nous sommes désormais dans l’optique de développer la capacité des habitant·e·s à agir sur leur quartier et sur leur ville. Non pas pour gagner la paix sociale, mais bien pour faire société.

Comment allez-vous réussir ce changement culturel ?

La démocratie locale à la rennaise se développe dans les différentes politiques publiques de la municipalité. Une trentaine de concertations sont prévues, dans les semaines à venir, sur des sujets très variés tels que le Livre blanc de la sécurité et de la tranquillité publique, la Charte de la démocratie locale, la Charte de l’animal dans la ville, etc. Cela témoigne d’une forte attente des citoyen·ne·s, et montre que la culture de la participation infuse chez les élus et dans les services la Ville. Le défi est maintenant de réussir à mettre tout cela en musique.

Quelles sont les marges de progression ?

Il reste encore beaucoup à faire : Nous devons mieux communiquer et être plus transparents avec les habitant·e·s, partir de leurs besoins et pas d’envies des élus. Mieux organiser les instances de quartier, travailler plus en mode projet. Que ce ne soit pas juste des espaces de consultation, mais bien de véritables espaces de co-construction avec les habitant·e·s. C’est ce type de démarche que nous souhaitons mettre en œuvre, par exemple, pour l’élaboration de la charte de l’animal dans la ville.

Que va apporter la nouvelle Charte de la démocratie locale ?

Ce sera aux Rennais·es de nous le dire ! Des ateliers ouverts à tou·te·s seront organisés à partir de fin avril. La finalité est de préparer la transition écologique et sociale de notre territoire. S’organiser du point de vue démocratique c’est aussi anticiper les crises à venir, sans oublier les groupes sociaux qu’on entend le moins…

Les citoyen·ne·s peuvent-ils vraiment se saisir de n’importe quel sujet ?

Oui, les citoyen·ne·s peuvent se saisir de n’importe quel sujet relevant des compétences de la Ville. Ce droit d’interpellation permet aux habitant·e·s, sous certaines conditions, de poser une question ou de demander qu’un sujet soit mis à l’ordre du jour du Conseil municipal. Il est également possible de demander la mise en place d’une expertise citoyenne. Nous travaillons activement à renforcer ces dispositifs.

Quid des associations, ne sont-elles pas un peu oubliées ?

Nous devons également faire une large place aux associations dont l’engagement n’est pas encore suffisamment reconnu. Elles sont en effet à l’initiative et au cœur de nombreuses politiques locales. Elles portent et accompagnement nombre de projets du budget participatif. Il nous reste à définir clairement leur place dans le schéma des différentes instances de la démocratie locale.

Quelles sont vos marges de manœuvre pour aller encore plus loin ?

Nos institutions françaises sont très verticales et descendantes. Elles ne favorisent pas suffisamment les expérimentations au sein des collectivités locales. Nous devons composer avec beaucoup de contraintes juridiques. C’est notamment le cas pour la rémunération des jurys citoyens ou l’organisation d’un référendum local. Cela demande beaucoup de créativité pour faire avec ou contourner le système.

Que souhaitez-vous pour la suite de cette aventure démocratique ?

Nous souhaitons faire que Rennes continue d’être le laboratoire de nouvelles formes de démocratie locale. Nous envisageons notamment de développer plus de démocratie directe avec par exemple des votations citoyennes. Il n’y a pas de recette universelle, c’est du cas par cas, une expérimentation en continu. Nous travaillons en réseau avec de nombreuses villes en France, tout particulièrement avec les communes de notre métropole.