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À la une Catherine Phalippou Conseil municipal

Burkini et liberté de conscience

[Conseil municipal du 8 octobre 2018]

Face aux attaques répétées de la droite et de l’extrême droite contre le burkini, nous avons tenu à affirmer notre attachement au principe de laïcité. L’esprit de la loi de 1905 est à l’inverse des attitudes qui pointent les bonnes ou mauvaises pratiques supposées. Il est de trouver les solutions pour que toutes et tous, athées ou croyants, puissent vivre ensemble au sein de la République.

 

 

Conseillère municipale déléguée aux Musées

Membre du conseil de la Laïcité

 

Intervention de Catherine PHALIPPOU au nom des élu·e·s écologistes et citoyen·ne·s 

 

Si affaire il doit y avoir autour du burkini, comme affaire il y a eu en son temps autour du foulard islamique, nous tenons en tant que groupe écologiste, à affirmer clairement notre position en faveur de la liberté de conscience.

Rappelons d’abord que la loi française de 1905 n’interdit pas à des citoyennes ou à des citoyens d’afficher dans les lieux publics des signes – même ostentatoires – de religion, mais que cette loi vaut pour les agents de l’État dont l’exercice de la fonction doit être séparé, neutre et libre vis à vis de toutes les églises, quelles qu’elles soient.

D’autre part l’enceinte d’une piscine publique n’est pas concernée par la loi du 14 mars 2004 qui impose l’exception des écoles, collèges et lycées de la République où la neutralité vestimentaire intervient comme principe de précaution pour les jeunes esprits. Rappelons aussi qu’aucune loi française ne traite des vêtements de bain, sinon en imposant dans les lieux et horaires publics des mesures d’hygiène. Enfin, nous nous permettons de rappeler – à la mémoire des oublieux – que la circulaire du 2 mars 2011 interdit en France la dissimulation du visage dans l’espace public et ne concerne alors pas le burkini qui laisse le visage visible.

La citoyenneté réclamerait-elle un uniforme pour calmer les bien pensants ?

Aristide Briand, alors qu’il préparait le projet de la loi de 1905, affirmait : « Toutes les fois que l’intérêt de l’ordre public ne pourra être légitimement invoqué, dans le silence des textes ou le doute sur leur exacte interprétation, c’est la solution libérale qui sera la plus conforme à la pensée du législateur. » Il s’agit d’être « libéral » c’est-à-dire s’imposer le plus grand respect possible de la liberté des individus.

Or quelle est effectivement la volonté manifeste d’une baigneuse en burkini ?

Là comme dans le précédent cas du foulard, il n’y a pas de risque de porter atteinte à l’ordre public. Là comme dans le cas du foulard, il n’y a pas de risque de rupture du pacte républicain.

Ce que nous, écologistes, nous comprenons de la femme en burkini dans une piscine publique, c’est qu’elle veut se baigner, faire du sport ou se détendre, en partageant l’accès à un service public, avec les autres, ses concitoyennes et concitoyens.

Les interprétations sur son endoctrinement, sa soumission, restent des projections sur un choix vestimentaire qui ne muselle pas sa parole, contrairement à ce que fait le choix vestimentaire de la burka que nous récusons sans ambiguïté.

Et quand bien même la femme en burkini serait en danger d’endoctrinement ? Qu’elle puisse sortir de chez elle pour se baigner, voir du monde, discuter avec d’autres personnes qu’un cercle fermé, à des heures publiques, n’est-il pas le seul antidote efficace au mal ?

Quelle autre solution proposer à moins d’évacuer ce que d’aucuns considèrent comme un problème ? Proposer des créneaux confessionnels ou des créneaux « spécial-femmes » ? Cela est inconcevable quand notre souci est celui de la « res-publica », c’est-à-dire de la « chose commune ».

Pour encourager au vivre ensemble, nous ne devons pas supporter les appels à l’interprétation malveillante lancés par ceux qui dénoncent derrière le burkini l’expression d’une fausse pudeur et qui ignorent la diversité du monde. La diversité – dans la limite soyons clairs, des comportements et discours hostiles à ce qui nous rassemble dans la liberté, l’égalité et la fraternité – la diversité nous enrichit.

L’esprit de la loi de 1905 est l’inverse des attitudes qui pointent les bonnes ou mauvaises pratiques supposées. De telles attitudes n’ont finalement pour seul objectif que de créer de l’exclusion et d’opposer les citoyens les uns aux autres.

Nous sommes lassé.e.s, agacé.e.s, de ces petits mots, ces petites phrases qui n’ont pour but que d’alimenter un fond de commerce électoral. Nous n’oublions pas – pour notre part -que chaque fois que ces petits mots, ces petites phrases sont prononcés, jetés en pâture à la presse, ce sont des personnes qui sont blessées, qui se sentent mises de côté parce qu’on les renvoie à l’idée qu’elles ne font pas pleinement partie de la République.

Nous dénonçons les volontés stigmatisantes de certaines ou certains. Et nous n’acceptons pas de laisser crier au loup. Notre mission politique est d’agir pour inventer un espace public qui n’est pas à neutraliser en exigeant de toutes et tous les mêmes vêtements, les mêmes comportements.

Aussi nous défendons, nous écologistes, dans cette enceinte de débats vouée au service de l’intérêt général, le droit de toutes et de tous de s’habiller selon ses convictions et préférences.

Nous affirmons que ce droit est accordable à tous et plus encore décidément, à l’inverse proportionnellement de la violence de certains propos, accordable à toutes les femmes. Ce droit vaut que l’on soit croyante ou non croyante, croyant ou non croyant, et la censure est inadmissible envers une citoyenne ou un citoyen qui n’enfreint aucune loi.

Ceux qui en définitive veulent voir dans le burkini une provocation anti-laïcité sont les mêmes qui se veulent dans le même temps exemplaires, alors qu’ils appliquent le « faites ce que je dis mais pas ce que je fais ». Il ne suffit pas d’avoir la tolérance plein la bouche pour être honorable, encore faut-il, dans ses positions et dans sa vie, être vraiment tolérante et tolérant.