Intervention de Matthieu Theurier au nom du groupe écologiste
La ville que nous voulons, c’est une ville à taille humaine, moins minérale, plus végétale, une ville solidaire, où tout un chacun peut trouver à se loger.
La modification n°9 du Plan Local d’Urbanisme de la Ville de Rennes vise pour l’essentiel à renforcer la mixité sociale par la production de logements sociaux et va bien dans le sens de la construction d’une ville solidaire et accueillante, où toutes les populations, quels que soient leurs niveaux de revenus, peuvent trouver à se loger.
De nombreux projets d’aménagement que nous approuvons – par exemple le projet de l’îlot de l’Octroi, de la brasserie Saint-Hélier, ou encore du Landry – pourront voir le jour suite à l’adoption de cette modification du PLU. Pour ces raisons nous voterons pour.
Elle appelle néanmoins plusieurs remarques et points de désaccord.
Tout d’abord sur la forme.
À l’heure de la Fabrique citoyenne – et comme l’a souligné la commissaire enquêteur dont je veux au passage souligner le travail de grande qualité – la multitude des points (54 modifications) abordés par cette modification du PLU n’a clairement pas facilité la consultation citoyenne.
Les documents n’étaient même pas accessibles par internet. Une telle modification aurait demandé un travail de concertation de plus grande ampleur, qui aille bien au-delà des simples obligations légales.
Nous espérons que les démarches de participation qui s’engageront très prochainement dans le cadre de Rennes 2030 autour de la révision du PLU permettront d’y remédier à l’avenir. Nous ne pouvons que souhaiter aussi l’installation rapide de la « Fabrique citoyenne du patrimoine » décidée lors des États Généraux de la Culture. Dans le cadre des grands dossiers d’aménagement en cours, celle-ci facilitera le dialogue avec les habitants sur les questions de patrimoine, qui soulèvent de façon récurrente des inquiétudes et points de vigilance de la part des Rennaises et des Rennais. Il nous faut y apporter de nouvelles réponses.
L’avis de la commissaire enquêteur rappelle d’ailleurs bien cette nécessité d’une concertation renforcée. Particulièrement sur l’aménagement des prairies Saint-Martin, projet qui nous est cher et sur lequel nous sommes particulièrement vigilants. Comme nous l’avions proposé il y a plusieurs mois, nous restons convaincus que la désignation d’un médiateur indépendant permettrait de faciliter la concertation sur ce projet mais aussi la gestion opérationnelle qui s’avère particulièrement complexe. L’avenir des maisons en bord de canal, au nord de la longère, reste aussi à éclaircir et nous pensons toujours que certaines d’entre elles, comme la maison du 80 canal Saint-Martin, mériteraient d’être préservées au regard de leur intérêt patrimonial. Nous sommes ainsi tout à fait en phase avec l’avis de la commissaire enquêteur lorsqu’elle affirme nécessaire de « renforcer la communication et la concertation », notamment, « afin de lever l’ambiguïté sur le devenir des maisons d’habitation ».
Sur le fond de cette modification du PLU, deux autres projets attirent particulièrement notre attention.
Le premier est celui du regroupement des deux magasins Lidl sur le même site de la rue de Châtillon. Les habitants ont fait savoir leurs inquiétudes quant au doublement de la surface commerciale de l’actuel magasin et à son impact en terme de circulation. Le projet a été retravaillé pour partie lors de réunion avec les adjoints de quartier. Ce travail nous semble aller dans le bon sens et doit être prolongé pour aboutir à un projet de qualité, qui devra notamment favoriser les déplacements alternatifs à la voiture en facilitant l’accès du nouveau magasin par la station de métro Henri Fréville. Il nous semble aussi souhaitable que le projet présenté par Lidl intègre notre préoccupation de faire de Rennes une ville plus végétale. Le projet devra préserver l’actuel jardin situé à l’angle de la rue de Châtillon et du boulevard Volclair.
Le second projet immobilier qui attire notre attention et même notre désapprobation est celui prévu en lieu et place de l’actuelle école Saint-Michel.
Ce projet porté par le Diocèse, propriétaire du terrain, et le promoteur BâtiArmor est de notre point de vue inapproprié et nous soutenons les demandes des habitants pour qu’il soit largement revu.
Ce projet comporte certes des éléments positifs. La construction de logements tout d’abord, nécessaire vu la croissance démographique de notre territoire. La création d’un cheminement piéton ensuite, entre la promenade Georges Brassens et la rue de Châteaugiron, qui facilitera les déplacements à pied.
Mais ce projet implique aussi la disparition d’une grande partie de l’actuelle cour de l’école Saint-Michel, la démolition d’une partie des bâtiments de l’école qui sont pourtant classés d’intérêt patrimonial, et surtout la construction d’une « tour signal » de 11 étages le long de la rue de Châteaugiron. Soit un immeuble de 35 mètres de hauteur, sur un terrain déjà situé en hauteur, à quelques mètres de l’église Saint-Hélier et dans un quartier où les bâtiments ne dépassent pas 20 mètres. Cette tour à l’aplomb de l’actuelle école maternelle privera la cour de tout ensoleillement. Pas idéal vous en conviendrez pour un site qui accueille 400 enfants.
Je ne m’attarderai pas sur le fait que le propriétaire du terrain a informé les parents d’élèves et les habitants de ce projet il y a seulement quelques mois alors qu’il est dans les cartons depuis plusieurs années. À l’heure de la démocratie participative, c’est proprement scandaleux.
Contrairement à ce qu’affirme le propriétaire du terrain, ce projet ne permettra pas non plus une rénovation de l’école puisqu’il n’est pas prévu à ce jour d’investissement sur l’actuel bâtiment.
Bref, c’est un projet mal ficelé au plan urbanistique. Pensé surtout dans l’objectif de vendre le plus cher possible au plus offrant. Et ce, au détriment du patrimoine du quartier et surtout des enfants de l’école. Bien loin donc des valeurs que nous défendons.
Sans remettre en cause le projet de construire des logements sur ce site, il nous semble tout à fait possible de revoir le projet actuel afin de mieux adapter les hauteurs des bâtiments prévus à la réalité du site et de son activité.
Nous avons parfaitement conscience qu’il s’agit bien là d’un projet privé, duquel la Ville de Rennes n’est pas à l’initiative, et sur lequel elle n’a pas complètement la main. Mais pour être réalisé, ce projet nécessite bien une modification du PLU, et cette modification est de notre pouvoir. De notre point de vue La Ville de Rennes doit donc jouer son rôle de régulateur en repoussant la modification du PLU pour ce projet tant qu’il n’aura pas été retravaillé en bonne intelligence avec les habitants et les 300 parents d’élèves qui ont fait savoir leur désaccord par pétition.
À quelques semaines du lancement de la démarche participative Rennes 2030, il nous semble opportun de remettre ce projet au débat et de le retirer de la modification du PLU que nous avons à voter aujourd’hui. C’est cette demande que le groupe écologiste fait aujourd’hui à travers l’amendement que nous avons déposé.
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