La Vice Présidence aux transports de Rennes Métropole et le délégataire Kéolis envisagent de mettre en place des portillons d’accès à l’entrée des stations de métro. C’est en partie grâce à la mobilisation des élu-e-s écologistes que cette décision, qui devait être soumise au vote le 26 février, a été reportée au prochain Conseil métropolitain le 30 avril. Elle ne figurait pourtant dans aucun des programmes présentés lors de la dernière campagne municipale et métropolitaine de mars 2014… | |
C’est une somme de 7,5 millions d’euros qui serait ainsi nécessaire pour l’installation de portillons sur les stations des lignes a et b du métro. Alors que d’autres solutions existent, cette mesure n’est pas acceptable pour plusieurs raisons.
La réalité du taux de fraudeSelon la Vice Présidence aux transports de Rennes Métropole : l’installation des portillons permettrait de «diminuer le taux de fraude du métro de manière substantielle (passage de 10% en 2014 à un objectif de 3 à 4% en 2020)» Ce taux de fraude de 10% inclut les abonnés qui oublient parfois de valider leur titre de transport. Effectivement la validation systématique des titres de transport, y compris les abonnements, tout au long du déplacement (1er voyage et changement de mode en correspondance) est obligatoire. Pour autant les usagers qui oublient cette validation sont bien titulaires d’un abonnement et donc en règle… La validation systématique a simplement pour objet d’offrir une connaissance plus fine du nombre de passagers dans les transports en commun. Son absence n’est pas un motif de fraude, et la considérer comme telle est une façon artificielle de gonfler les chiffres. Si l’on déduit du taux de fraude les abonnés qui omettent de valider leur titre de transports ce taux tourne alors plutôt autour de 8,9%. Par ailleurs ce taux de fraude ne concerne pas seulement le métro mais l’ensemble du réseau de transports, bus compris. Or l’installation des portillons n’apporterait aucune amélioration contre la fraude à bord des bus, ce qui minore de fait l’impact global de cette mesure. De plus, l’expérience des autres villes ayant fermé l’accès à leur métro par des portillons montre que cela ne fait pas disparaitre une fraude résiduelle sensiblement supérieure à l’objectif affiché par Rennes Métropole, plutôt de l’ordre de 5 à 6%. Enfin, le taux de fraude pour le stationnement voiture est quant à lui de 70%… La première urgence est plutôt d’investir dans des moyens humains pour sanctionner les automobilistes qui fraudent.
Des portillons chers et contre-productifsSelon la Vice Présidence aux transports de Rennes Métropole, l’installation des portillons pour un coût estimé à 7,5 millions permettrait un gain annuel estimé à 1,5 millions d’euros par an. On l’a vu plus haut, ce gain annuel est probablement surestimé, d’autant qu’il fait l’impasse sur le report modal d’une partie des fraudeurs qui, au lieu de payer demain un ticket, préfèreront opter pour un autre moyen de transport – y compris motorisé. Il faut surtout rappeler que l’objectif d’une collectivité comme Rennes Métropole est d’abord d’inciter à l’usage des transports en commun et des déplacements actifs (vélo, marche à pied…) et de réduire la place de la voiture en ville. Installer des portillons, c’est envoyer un signal négatif à l’utilisation des transports en commun et gêner leurs usagers. Il s’inscrit dans une logique de répression, plutôt que de prévention. La fermeture du métro est contradictoire avec l’image de ville à taille humaine et ouverte de Rennes, alors même que les usagers vantent aujourd’hui la simplicité et la convivialité de leur métro. L’air du temps est malheureusement au «tout sécuritaire» mais oublie que cette convivialité est aussi un puissant vecteur de sécurité. Dans ce contexte, nous pourrions nous féliciter d’être la ville qui a su résister et souffler dans un autre sens, celui de la prévention, de l’éducation et de la facilité des déplacements pour les plus fragiles. Pour certains, les portillons empêcheront un accès facile aux quais : les familles avec poussettes, les personnes à mobilité réduite, les personnes âgées, devront franchir un sas avec deux portes. Pour faire diminuer modestement la fraude, ce sera l’ensemble des usagers qui sera pénalisé. Quant à l’argument de la sécurité, avancé par Rennes Métropole, il est difficilement tenable : en cas de trop forte affluence due, par exemple, à une manifestation, il est toujours possible de fermer une station, comme ça a été le cas lors de la mobilisation citoyenne du 11 janvier dernier.
Lutter contre la repasse de ticket : pour quoi faire ?Selon la Vice-Présidence aux transports de Rennes Métropole : «La perte de recette liée à la fraude serait alors de près de 3,5 M€, plus de l’ordre de 400 000 € lié au phénomène de repasse de tickets.[…] Afin de réduire de manière importante la repasse, il est proposé le passage au tout sans contact par suppression des tickets papier au profit d’un support à puce simplifié mais rechargeable.» La repasse des tickets ne peut pas être considérée comme une fraude ou une perte de recette. Un ticket est bien valable une heure, il n’est pas nominatif et rien n’empêche donc qu’il soit utilisé par plusieurs personnes. Rien ne justifie une lutte contre ce geste de solidarité entre usagers. La fin des tickets au profit de cartes à puce est aussi présentée comme plus écologique car utilisant moins de papier. Rappelons que le papier peut être recyclé plus de 10 fois. Les cartes à puce demandent par contre l’utilisation de métaux rares, non renouvelables. Elles demandent beaucoup d’énergie à la production et sont difficiles à recycler.
D’autres solutions existentL’installation de portillons permettrait, selon Rennes Métropole, de collecter 1,5 millions d’euros de recettes nouvelles (soit 1,8% du budget global de fonctionnement). Quand bien même ce chiffre serait avéré, ces recettes pourraient être trouvées aisément d’autres façons:
|