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Garantir une eau de qualité et disponible pour l’avenir de notre territoire

Conseil métropolitain du 26 septembre 2024 – Intervention portée par Morvan Le Gentil  au nom des élu·e·s écologistes et citoyen·ne·s sur la délibération n°11 – M. Hervé P. : Eau potable – Rapport d’activité pour l’exercice 2023 valant Rapport annuel sur le Prix et la Qualité du Service

Comment imaginer l’avenir de notre territoire avec une eau polluée ou même sans eau ? Après une longue période de déni sur la fragilité de la ressource en eau en Bretagne, la prise de conscience grandit grâce notamment au travail de longue haleine des associations et des lanceurs d’alerte bretons. Il est temps de faire face aux constats alarmants et d’agir en conséquence car il est de notre responsabilité en tant que collectivité publique d’assurer à l’ensemble des habitantes et habitants l’accès à ce bien de première nécessité : une eau saine et en quantité suffisante.

Or, aucune masse d’eau n’est en bon état écologique sur notre Métropole. Cela a trait notamment à la morphologie des cours d’eau, mais aussi à la pollution. Chaque année, des études mettent en lumière l’omniprésence de produits phytosanitaires dans les cours d’eau bretons. 95% des eaux bretonnes contiennent des métabolites de pesticides. Et les ventes de pesticides, qui avaient stagné au début des années 2010, sont reparties de plus belle ces dernières années. En 2023, la CEBR a noté une hausse du métazachlore, un herbicide utilisé dans les cultures de colza, dans les zones de captage de l’eau potable sur le bassin rennais. On note également la présence persistante du métolachlore, pourtant interdit par l’ANSES. Autre source de pollution : les PFAS. Au printemps dernier, l’ONG Générations futures a identifié ceux qu’on appelle les polluants éternels dans près de 64% des cours d’eau de notre département.

Cette pollution massive des eaux de notre territoire pose un problème majeur de santé publique et environnementale, puisque de nombreuses études scientifiques font le lien entre ces pollutions et l’impact sur la santé humaine et les écosystèmes. Il s’agit aussi d’un problème éminemment financier car c’est bien souvent à la collectivité publique et donc au contribuable, de supporter les milliards d’euros de dépollution, sans compter bien sûr les coûts en termes de soin. Ce principe pollués-payeurs est injuste. 

Comment alors renverser la table et passer des études aux actes ? Quels sont nos leviers au niveau local ? Le SAGE constitue le seul document réglementaire au niveau local permettant l’interdiction des pesticides. En cours de renouvellement cette année, les représentants majoritaires du secteur agricole n’ont eu de cesse de faire pression pour imposer des normes au rabais en matière de pesticides, jusqu’à menacer de ne pas voter le document final. 

Pourtant, l’avenir de l’agriculture dépend également de la bonne qualité de la ressource La consultation citoyenne sur le SAGE s’est exprimée très clairement en faveur de la préservation de la ressource en eau. La CEBR est exemplaire dans ce domaine, en déployant à l’échelle micro un éventail d’outils au service des agriculteurs. Mais il nous faut trouver plus globalement des voies d’engagement collectif, y compris juridiques, pour tenir notre promesse métropolitaine en faveur d’une sortie des pesticides de synthèse à l’horizon 2030. Car sans un soutien plus déterminé au changement de modèle agricole, nos territoires ne seront pas au rendez-vous des enjeux.

Nous saluons la récente proposition de Jean-Claude Raux, député écologiste de Loire Atlantique, d’interdire les pesticides dans les aires d’alimentation de captage d’eau potable

Cela pourrait se coupler aux efforts de maîtrise foncière publique des zones de captage, tels qu’engagés par la CEBR : car protéger l’eau passe aussi par la protection des terrains qui irriguent les captages.

Mais protéger la ressource, c’est également veiller à sa disponibilité. Alors que la Bretagne s’est longtemps crue épargnée, nous devrons faire face à un défi majeur concernant l’accès à l’eau. En un demi-siècle, la température du bassin rennais a augmenté de 1,5 °C, accompagné d’une baisse significative des précipitations. A plusieurs reprises, notre département a été placé en vigilance sécheresse dès le mois de juin. Ces périodes de manque d’eau se multiplieront et s’intensifieront sur notre territoire, même si le phénomène peut varier d’une année à l’autre. Ainsi, les projections indiquent que le niveau du barrage de la Chèze continuera de baisser jusqu’en 2040, avec un risque de niveau critique en cas de sécheresse deux années de suite, alors qu’il constitue le principal réservoir d’eau potable du bassin rennais

Notre priorité politique doit être celle de la sobriété. Il nous faudra envisager la possibilité de prioriser voire de renoncer à certains usages pour un partage équitable de la ressource. La CEBR travaille à l’amélioration de l’efficacité de la production d’eau potable ainsi qu’à la sensibilisation aux économies d’eau. Entre 2019 et 2023, le programme Ecodo a notamment contribué à économiser 5 millions de mètres cubes d’eau. Il nous faut poursuivre et amplifier cette voie, en la couplant à une tarification toujours plus progressive notamment pour les gros consommateurs. 

La récente décision de justice qui rend illégales quatre méga-bassines dont celle de Sainte Soline symbolise l’aberration de vouloir privatiser ce qui est bien commun. Quoi de mieux qu’un service public pour défendre l’intérêt général, la justice sociale et le bien commun dans les enjeux autour de la ressource en eau ? Après plus d’un siècle d’une gestion de l’eau déléguée au secteur privé, la reprise en main par la puissance publique a permis une gouvernance plus démocratique, une tarification unique et sociale de l’eau, et des marges financières pour mieux investir sur la prévention et sur l’entretien des réseaux. Cela a aussi permis une innovation comme le programme Terres de Source, outil de valorisation des filières locales lorsqu’elles préservent la qualité de l’eau et de l’air.

Nous fêterons cette année les 10 ans de cette gestion publique de l’eau, matérialisée par la délégation intégrale de toute la distribution d’eau potable à notre SPL. Nous pouvons être fiers de ce modèle d’avenir, efficace et inspirant.

Seul le prononcé fait foi