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À la une Conseil municipal Valérie Faucheux

Stop à l’écolobashing : il est temps d’agir pour un monde vivable !

Conseil municipal du 26 juin 2023 – Intervention de politique générale portée par Valérie Faucheux au nom des élu·e·s écologistes et citoyen·ne·s

L’écologie est régulièrement prise pour cible. Ces dernières années, elle est affublée de qualificatifs négatifs qui visent à la décrédibiliser, à travers un savant processus de retournement de langage. Au lieu de fédérer pour faire face aux défis écologiques communs, les adversaires de l’écologie préfèrent user de mots barbelés qui clivent la société et nous éloignent des vrais enjeux. « L’écologie punitive » en est un. La semaine dernière, Emmanuel Macron a récidivé en opposant « sobriété punitive » et « sobriété raisonnable ». Comme si le risque, c’était trop de sobriété !

Mais un monde à +4 °C, est-ce raisonnable ? Une France à 50 °C, n’est-ce pas punitif ? Qui va en pâtir en premier si ce n’est les plus pauvres, les plus précaires d’entre nous ? La punition, c’est de voir sa maison détruite par une inondation, brûlée lors d’un incendie. La punition, ce sont les restrictions d’eau en période de sécheresse. La punition, c’est de voir nos aîné·e·s, les personnes les plus fragiles en termes de santé, mourir de chaleur. Prendre des mesures pour préserver des vies humaines, est-ce punitif ? Et pratiquer la novlangue pour détourner d’une action climatique ambitieuse, n’est-ce pas tout simplement irresponsable ?

Nous savons toutes et tous ici que les dernières nouvelles climatiques ne sont pas bonnes. C’est même un euphémisme, elles sont catastrophiques. Méga-feux au Canada qui ont dévoré 6 millions d’hectares depuis janvier et dont les fumées viennent aujourd’hui de toucher la France, vagues de chaleur en Sibérie, canicules marines records, etc. au-delà des dernières actualités, la publication récente de plusieurs études scientifiques donne à voir l’extrême gravité de la situation climatique mondiale : 

  • 7 limites planétaires sur 8 ont été dépassées, entraînant des répercussions irréversibles pour le vivant dans les domaines du climat, de l’eau, des pollutions ou encore des espaces naturels ;
  • le réchauffement climatique s’accélère : la concentration en CO2 atteint une valeur inédite depuis plus de 2 millions d’années et le GIEC estime que le dépassement du seuil critique des 1,5 °C de l’accord de Paris aura lieu dans moins de 7 ans ;
  • la banquise d’été dans l’océan du Nord fond de façon irréversible et pourrait avoir totalement disparu dès le début de la décennie 2030 ;
  • les canicules de l’été 2022 ont tué plus de 16 000 personnes en Europe et d’ici la fin du siècle, 2 milliards de personnes seront exposées mondialement à une chaleur extrême et potentiellement mortelle ; pour chaque augmentation de 0,1 °C au-dessus des niveaux actuels, 140 millions de personnes supplémentaires seront exposées à une chaleur dangereuse.

C’est bien cette réalité scientifique du bouleversement climatique qui motive et guide l’action des écologistes, partout dans le monde. Nous agissons pour enrayer le cycle des dérèglements et de ses impacts dramatiques, et pour nous préparer collectivement à y faire face. Au regard de la gravité des enjeux, il est donc temps d’en finir collectivement avec ce terme d’écologie punitive ainsi que de tous les autres vocables visant à disqualifier les politiques climatiques.

Il est temps aussi de mettre un terme à la criminalisation du mouvement écologiste, qui relève de la même dynamique d’inversion des responsabilités. Nous condamnons la dissolution des Soulèvements de la Terre, soutenus par plus de 130 000 personnes qui prennent au sérieux la défense du vivant. Nous condamnons toutes les menaces et violences exercées contre les militantes et militants écologistes. Ce sont les responsables politiques qui préfèrent étouffer les mobilisations citoyennes pour le climat au lieu d’y apporter des réponses politiques qui sont au mieux totalement dépassées, au pire irresponsables. 

Notre territoire n’est pas une île isolée, préservée des processus mondiaux à l’œuvre : il se trouve confronté à un sérieux défi sur la quantité de l’eau disponible sur notre territoire. Notre département vient d’être placé pour la deuxième année consécutive en vigilance sécheresse dès le mois de juin. À l’avenir, ces sécheresses vont à la fois se multiplier et s’intensifier sur notre territoire. 

La ressource en eau va manquer et nous devons nous y préparer. En un demi-siècle, le bassin rennais s’est réchauffé de 1,5 °C, avec une baisse marquée de la pluviométrie. Selon la dernière étude de la Chaire Eaux et Territoires portée par l’Université de Rennes 1, à partir de 2040, les sécheresses de 1976 ou de l’été 2022 surviendront désormais 3 années sur 4 et deviendront la norme d’ici la fin du siècle.

Le Barrage de la Chèze tendra à la baisse jusqu’en 2040, avec un risque de terminer à sec, alors qu’il constitue le principal réservoir d’eau potable du bassin rennais. La demande en eau va quant à elle continuer à croître, notamment au regard de la croissance démographique prévue dans la métropole rennaise. Selon une étude de Rennes métropole, le risque d’inondations par débordement de cours d’eau va augmenter au vu d’une multiplication de la récurrence et de l’intensité des crues. Aucun réseau ne pourra y faire face. S’adapter passera nécessairement par la désimperméabilisation des sols favorisant l’infiltration. La gestion quantitative de l’eau s’affirme aujourd’hui comme une priorité. Notre politique doit se structurer autour de la sobriété et la priorisation des usages de l’eau, avec des possibilités de renoncement, le partage équitable de la ressource et la prévention des risques d’inondation.  

Incitons à ne plus construire de piscines privées. Accompagnons les plus gros consommateurs d’eau dans une trajectoire réellement ambitieuse de réduction. Engageons-nous également à ce que sur notre territoire, plus aucun projet d’aménagement ne puisse détruire de zones humides ! Nous nous réjouissons de la décision d’abandon du projet de nouvelle usine Bridor à Liffré.  Nous saluons celles et ceux qui se sont mobilisés contre ce projet qui prévoyait d’être fortement consommateur d’eau et aux antipodes de l’économie durable auquel nous aspirons pour notre territoire.

Comme dit le politologue expert des questions climatiques François Gemenne : « il est tard, mais pas trop tard ». Il ne s’agit plus simplement de fermer le robinet quand on se lave les dents, il s’agit de réinventer profondément notre modèle de développement, nos façons de vivre et de réinterroger nos normes sociétales de réussite et de progrès. 

Notre écologie n’est pas punitive, elle est pourvoyeuse de solutions. Quand elle cherche à contraindre l’usage de la voiture, elle démultiplie l’offre de transports en commun et propose des tarifications solidaires. Quand elle défend la zéro artificialisation nette, elle réinvente l’habitat et les zones d’activités économiques. Quand elle veut éco-conditionner les aides économiques, elle propose d’accompagner les entreprises dans leur transition. Alors, non, notre écologie n’est pas punitive, elle apporte simplement des réponses pour garder notre monde vivable.

Seul le prononcé fait foi