Assassinats de membres de la communauté kurde à Paris, manifestations violentes à Lyon, tentatives d’expéditions punitives envers les supporters du Maroc pendant la Coupe du monde, projets de coup d’État en Allemagne et en France, manifestations de l’extrême droite espagnole contre le gouvernement socialiste de Pedro Sánchez, défilé des néofascistes à Rome avec des membres de l’extrême droite française. La liste des faits violents attribués à l’extrême droite et son idéologie s’allonge en France et en Europe ces derniers mois.
Violence dans les actes, mais aussi violences dans les mots et les symboles. À Besançon, en novembre dernier la statue de Victor Hugo sur l’esplanade des Droits de l’homme a été vandalisée par des jeunes appartenant à un groupuscule nationaliste identitaire. L’un d’entre eux, candidat en 2020 et 2021 pour le Rassemblement national, affiche désormais son appartenance à Reconquête. Au nom de revendications suprémacistes, c’est l’auteur de la statue qui était visé : Ousmane Sow, extraordinaire sculpteur sénégalais, membre de l’académie des Beaux-Arts. Ousmane Sow et Victor Hugo, 2 universalistes, 2 républicains souillés par la haine
À Rennes, des croix celtiques et des graffitis homophobes ont recouvert les murs de l’Université Rennes 2 la semaine dernière. La multiplication vertigineuse de ces actes est à mettre en corrélation avec la montée au pouvoir des partis d’extrême droite qui légitiment par leurs discours et leurs prises de position ces violences envers nos concitoyennes et concitoyens d’origine étrangère, envers les militantes et militants de gauche ou encore envers des élus locaux humanistes.
« Qu’il retourne en Afrique » ! Par ces mots, qu’ils soient au singulier ou pluriel, le député Rassemblement National Grégoire de Fournas essaime ses idées mortifères et stigmatise nos concitoyennes et concitoyens en fonction de leurs origines ou de leur couleur de peau. La légitimité apportée par leurs représentants à l’Assemblée nationale conduit les militants d’extrême droite à passer à l’action notamment en attaquant des personnes migrantes ou membres des minorités.
Récemment, c’est en Bretagne que la haine et la violence xénophobe ont frappé un petit village pourtant paisible. En effet, les élus de Callac avaient pour projet d’accueillir quelques familles de réfugiés avec le soutien d’une partie importante de la population. Ce projet appelé « Horizon » prévoyait d’accueillir des réfugiés dans le but de redynamiser la commune et développer de nouveaux services publics qui auraient bénéficié à toute la population locale. Cependant, dès l’annonce du projet, la commune a été visée par des attaques et des manifestations de l’extrême droite. Ces actions avaient pour but de diffuser la peur au sein de la population et de mettre la pression sur les élus locaux qui ont été menacés et harcelés notamment sur les réseaux sociaux. Le 11 janvier, de guerre lasse, le maire a annoncé renoncer au projet pour se libérer des pressions et dénoncer un manque de soutien de la part de l’État face à ce déchaînement de haine.
Reconquête !, le parti d’extrême droite d’Éric Zemmour, s’est félicité de cette victoire. Il avait fait de Callac un symbole dans la lutte contre ce qu’il nomme le « Grand remplacement ». Cette théorie xénophobe développée par Renaud Camus est un poison qui contamine les esprits et conduit à des actes violents à Callac, mais aussi ailleurs comme aujourd’hui à Saint-Brevin-les-Pins en Loire-Atlantique. Pour rappel, en Nouvelle-Zélande, les attentats de Christchurch, qui ont couté la vie à 51 personnes notamment de confession musulmane, ont été perpétrés au nom de cette théorie par un suprémaciste blanc proche de l’extrême droite française.
La Bretagne, cette terre refuge pour les exilés fuyant la guerre, l’oppression ou la dictature, n’est désormais plus épargnée par la montée de l’extrême droite. Face au développement de ces idées violentes, nos collectivités locales ont un rôle à jouer. C’est à travers nos politiques d’égalité et de lutte contre les discriminations que l’on peut questionner et déconstruire les stéréotypes et ainsi favoriser une meilleure compréhension entre nos concitoyennes et concitoyens. Nous devons donc collectivement investir davantage le champ de la lutte contre les discriminations à tous les échelons : municipal, intercommunal, départemental, mais aussi régional, et non pas se concentrer uniquement sur le volet égalité femme/homme.
Nous, écologistes, sommes convaincus que la combinaison des différentes politiques locales d’égalité avec le soutien de l’État sont un levier important dans la lutte contre l’extrême droite et son idéologie. Cependant, le gouvernement ne semble pas prendre la mesure de ces graves dangers. Pire, le gouvernement préfère criminaliser les mouvements de résistance écologistes, faisant planer la menace d’un supposé terrorisme vert ! Pire encore, dans ce contexte politique xénophobe, le gouvernement n’a pas trouvé meilleure idée qu’une nouvelle loi sur l’immigration, pourquoi ? Nous le demandons à Emmanuel Macron et Gérald Darmanin, pourquoi cette loi ? Et pourquoi maintenant ? Qu’a à gagner le gouvernement à courir après le RN ?
Nous condamnons la stratégie politique de la majorité actuelle qui vote des lois liberticides et contraires aux valeurs républicaines pour essayer de couper l’herbe sous les pieds à l’extrême droite, espérant ainsi empêcher leur arrivée au pouvoir. C’est pourtant l’inverse qui se produit, le Rassemblement national et ses organisations satellites n’ont pas cessé de prospérer depuis 30 ans atteignant plus de 13 millions d’électrices et d’électeurs au second tour de la dernière élection présidentielle. Le barrage républicain est de plus en plus mis à mal par cette stratégie irresponsable qui conduit les citoyennes et les citoyens à ne pas vouloir choisir entre l’original et la copie.
Nous demandons la mise en œuvre des préconisations de la commission d’enquête parlementaire transpartisane de 2019 visant à empêcher le développement des groupuscules d’extrême droite en France. Nous demandons que les auteurs de ces actes soient poursuivis et punis. Nous soutenons l’appel d’Éric Piolle pour une Convention citoyenne sur la Migration afin de débattre et de proposer des projets de loi sur les questions relatives à l’accueil et au séjour des étrangers, et pour déconstruire les préjugés.
Nous sonnons ce soir l’alerte sur la progression des forces xénophobes et racistes en Bretagne, en France et en Europe. Parce que notre démocratie est fragile, nous en appelons à tous les humanistes. Il est plus que jamais nécessaire d’agir pour l’égalité, la diversité culturelle, l’éducation et l’émancipation de nos enfants, la liberté de la presse, la démocratie, la tolérance et l’ouverture d’esprit. Ce sont bien ces valeurs qui nous permettent de construire l’avenir de toutes et tous dans une réelle promesse de fraternité et de sororité.
– Seul le prononcé fait foi –