À l’heure de la banalisation des discours de haine, des pires théories complotistes de l’extrême droite, nous devons collectivement combattre les violences discriminatoires de manière globale et dans leur complexité. Les rapports sur les discriminations en France se suivent et malheureusement se ressemblent. « L’épreuve de la discrimination » selon les mots du sociologue Julien Talpin est une épreuve qui a des conséquences tangibles sur les trajectoires et perspectives d’ascension sociale et sur la santé mentale des personnes qui incorporent ces formes de violence. Les effets de repli sur soi en sont souvent les effets collatéraux.
Alors que l’égalité est une puissante aspiration au sein des États de droit, en tant qu’élus locaux, nous avons le devoir d’exemplarité. Il nous faut remettre sans cesse ce principe d’égalité au cœur de nos politiques publiques. Nous avons le devoir de lutter contre la culture de l’impunité. Nous avons le devoir de nous former régulièrement, et cela tombe bien puisque la formation des élu·e·s et des agents et agentes à la lutte contre les discriminations est un des axes forts de la Ville de Rennes et de Rennes Métropole pour rappeler que le respect des femmes, des minorités de genre, des minorités ethniques, des personnes en situation de handicap, et de leurs droits, sont une priorité politique.
Le mois de novembre a été l’occasion de mettre en lumière de nombreuses actions portées par les associations rennaises et les services de notre collectivité contre le sexisme. L’Assemblée nationale a voté l’inscription du droit à l’IVG dans la Constitution, un acte fort et nécessaire. Mais la vérité, c’est que les violences de genre, bras armé du patriarcat, sont bien ancrées dans notre société. La vérité c’est qu’en France, un homme assassine sa compagne ou son ex-conjointe tous les deux jours et demi. La vérité c’est qu’en France, seulement 1 % des hommes auteurs de viols sont condamnés. La vérité c’est que nous n’avons toujours pas le milliard d’euros de l’État tant demandé par les associations et les professionnel·le·s qui accompagnent les victimes, alors que la lutte contre les violences faites aux femmes est proclamée comme grande cause du quinquennat.
Dans l’agglomération rennaise, les violences sexistes et sexuelles ont augmenté de 35,7 % entre 2020 et 2021. Le projet de Maison des Femmes porté par la Ville de Rennes avec ses partenaires est un projet phare pour répondre localement à ces enjeux. Nous le savons, la politique d’éducation est également un puissant levier pour changer les rapports entre les filles et les garçons. Caroline de Haas disait récemment aux Assises nationales de la Lutte contre les violences sexistes et sexuelles à Nantes : à quand un grand programme d’éducation à l’égalité et à la sexualité obligatoire à l’école comme l’a été l’éducation à la sécurité routière considérée comme une question de santé publique ?
À cette question s’ajoute celle de la lutte contre le racisme et les autres discriminations. Chèr·es collègues, permettez-moi de vous poser la question : qui parmi vous connait la date de la Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale ? C’est le 21 mars, et ce depuis 1966 comme l’a défini l’ONU. Nous le savons, les discriminations fondées sur le genre se combinent aussi au racisme et aux discriminations liées au handicap, à la confession religieuse, aux ressources économiques et à bien d’autres discriminations. Ces injustices multifactorielles et répétées affectent l’estime de soi, la relation aux autres et, dans une certaine mesure, le rapport à l’appartenance nationale et la confiance envers les institutions. Dans ce contexte, il nous faut éviter un piège qui consisterait à amplifier d’un côté les actions contre le sexisme et à minimiser les moyens dédiés à la lutte contre le racisme et aux autres discriminations.
Les 15 et 16 novembre derniers, 18 experts et expertes indépendants du Comité de l’ONU pour l’élimination de la discrimination raciale ont examiné la politique française envers ses minorités. Le comité de l’ONU demeure, je cite : « préoccupé par la persistance et l’ampleur des discours à caractère raciste et discriminatoire, notamment dans les médias et sur internet ». Comme la défenseure des droits, il déplore la faiblesse de la politique pénale en matière de lutte contre le racisme, affirmant que le phénomène de sous-déclaration est énorme et que l’insuffisance des enquêtes conduit à un taux de classement sans suite très élevé.
Aussi, nous les écologistes, nous pensons qu’il faut accélérer les actions en faveur de l’égalité sur notre territoire, lutter contre le non-recours aux dispositifs d’accompagnement des victimes et déployer plus de solutions de prévention. À ce titre, nous nous réjouissons du travail en cours sur la cellule Discrim’alert pour les 5000 agentes et agents de la ville de Rennes, du CCAS et de Rennes Métropole. Nous serons également attentifs aux résultats des États généraux de l’Égalité une fois qu’ils seront partagés, et au travail en cours sur la création de l’observatoire métropolitain des discriminations. Nous rappelons aussi l’importance de l’éga-responsabilité, des entreprises et aux associations, pour laquelle la collectivité doit être à la fois facilitatrice par la mise à disposition d’outils, mais aussi exigeante au travers de ses aides publiques.
Nous sommes en revanche inquiets face à l’annonce par le Ministre de la Ville et du Logement Olivier Klein devant France Urbaine des premières orientations des nouveaux contrats de ville pour les quartiers populaires et de l’absence de l’égalité et de la lutte contre les discriminations comme un des axes majeurs.
– Seul le prononcé fait foi –