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Conseil municipal Gaëlle Rougier

L’écologie mise à mal, notre mobilisation intacte

[Conseil municipal du 27 juin 2016]

Brexit, Notre-Dame-des-Landes, deux défaites pour l’écologie politique, mais notre volonté de faire exister un monde respectueux de l’environnement demeure plus que jamais intacte.

Conseillère municipal

Co-présidente du groupe écologiste à la Ville de Rennes

Intervention de Gaëlle Rougier au nom du groupe écologiste 

citationCes derniers jours, l’écologie a subi deux défaites qui, si elles n’entament pas notre détermination, sont néanmoins de réelles déceptions.

Le Royaume-Uni a voté à 52 % pour sa sortie de l’Union Européenne. Comment ne pas être attristés par le résultat de ce référendum ?

Mais comment ne pas être indignés des mensonges qui ont été proférés pour inciter les britanniques à voter le Brexit ?

Comment ne pas être en colère aussi en entendant Monsieur Junker, Monsieur Cameron, Monsieur Tusk se lamenter aujourd’hui du vote britannique ? Les pyromanes d’hier jouent aujourd’hui aux pompiers après avoir promu pendant des années une Europe libérale, et avoir défendu les intérêts nationaux parfois contre l’intérêt général des citoyens européens, comme en Grèce ou en Espagne.

Le vote pro Brexit exprime, comme nous pouvions le pressentir, une souffrance sociale et un sentiment d’abandon par les pouvoirs publics chez nombre de citoyens britanniques. Entre les politiques d’austérité et l’incapacité à accueillir dignement et efficacement le flux de migrants, l’Europe cristallise la défiance des peuples pour les institutions et celles et ceux qui les dirigent.

Si l’Europe n’est pas responsable de tous les maux, nous ne pouvons que constater l’échec du processus de construction européenne.

Et c’est en cela aussi ce soir que je dis que l’écologie est en berne.

L’Europe est dans l’ADN de l’écologie. Nous, écologistes, avons toujours plaidé pour une Europe fédéraliste, sociale, écologique et démocratique.

Nous sommes persuadés que les grandes problématiques de ce siècle, comme les crises écologique et climatique, ou celle des migrants, ne se régleront qu’à l’échelon européen.

Seule une union politique à l’échelle de l’Europe nous permettra de peser face aux grandes puissances que sont les États-Unis et la Chine.

Mais cette Europe-là n’est pas celle qu’on nous propose. Notre incapacité à construire un grand récit européen auquel les citoyens peuvent se raccrocher laisse la place aux nationalismes, aux populismes, aux replis identitaires.

Il faut voir l’état politique de l’Europe et sentir le vent du boulet. Regardons en Autriche, en Pologne, en Hongrie. Regardons les victoires du mouvement 5 étoiles en Italie, regardons au-delà du Brexit, l’ascension de UKIP, grand gagnant de cette séquence désastreuse.

Regardons en France la montée inexorable de l’extrême droite qui parle justement aux laissés-pour-compte des politiques d’austérité, en milieu rural, mais aussi dans les milieux ouvriers, syndicaux, chez les agents de la fonction publique de catégorie C, chez les agriculteurs, chez les jeunes même où la percée est palpable.

Les alertes retentissent et le gouvernement détourne le regard.

Autre revers pour l’écologie politique ce dimanche, concernant le projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes. La défaite électorale du « non » à la consultation en Loire-Atlantique, s’accompagne de la satisfaction d’avoir vu plus d’un électeur sur deux se rendre aux urnes. Nous nous félicitons de cette bonne participation qui montre que la question de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes est une question importante pour les citoyens. Cela doit nous encourager à expérimenter à nouveau la démocratie directe, mais dans un cadre formalisé, cohérent, transparent et équitable. Ce qui était loin d’être le cas ici. Un sondage IFOP de mars 2015 démontrait que seule une consultation sur le périmètre de Loire Atlantique pouvait donner le « oui » victorieux alors même que ce projet est payé par tout le Grand Ouest.

Nous avons toujours contesté le périmètre, qui a été choisi pour donner la réponse attendue par les promoteurs du projet. Pour autant, nous prenons acte du résultat.Mais tout comme les Britanniques europhiles n’ont pas remisé leurs drapeaux européens au lendemain du Brexit, nous resterons fidèles à nos convictions.

Ce n’est pas faire de la démocratie à géométrie variable, comme nous en accusent certains mais au contraire rester cohérents avec nos engagements de toujours.

Car le constat glaçant reste le même : chaque année, le développement des infrastructures de transports, de logements, d’activité commerciale, détruit entre 50 000 et 100 000 hectares d’espaces agricoles en France. L’équivalent d’un département disparaît tous les dix ans sous le béton. Cette moyenne est encore plus élevée en Bretagne, nous les champions de l’artificialisation des sols. 100 millions de tonnes de CO2 sont émis chaque année, soit 20 % des émissions de gaz carbonique du pays.

Les mêmes questions fondamentales demeurent : que voulons-nous faire de notre planète ? Quel rapport à notre milieu de vie souhaitons-nous construire ? Faut-il pour « faire territoire » le soumettre aux règles de l’utilité économique ou respecter ses fonctions naturelles de zones humides, de biodiversité, de résilience des sols face aux inondations ? Quel climat, quelle qualité de l’eau voulons-nous, quelle qualité de l’air ?

Enfin, nous pouvons tirer un enseignement intéressant de cette consultation. On s’aperçoit aussi qu’en recoupant les résultats issus de cette consultation et ceux des dernières élections dans le département de Loire-Atlantique, les anti-aéroports semblent être les électeurs de gauche. Ce que corrobore un sondage IFOP paru en mars dernier soulignant que parmi les électeurs de gauche des Pays-de-la-Loire, 55 % sont opposés au projet d’aéroport (dont 52 % au parti socialiste). Au-delà du résultat brut de la consultation, au gouvernement d’en tirer la leçon…

Nous verrons dans les mois et les années qui viennent les suites concrètes de ce référendum. Le Président de la République dit s’être inspiré du référendum de 2011 au Bade-Wurtenberg pour asseoir la légitimité de celui sur Notre-Dame-des-Landes. François Hollande aura été bien mal inspiré : le projet de la gare de Stuttgart s’enlise depuis lors et sa facture est passée de 2,6 milliards d’euros à un coût annoncé de 10 milliards que personne ne veut payer.

Espérons que les Ligériens et les Bretons ne se réveillent pas dans quelques années avec une telle gueule de bois.

Brexit, NDDL, vote au Sénat pour reporter l’interdiction totale des néonicotinoïdes, véritables poisons responsables de la disparition en masse des abeilles, report de la fermetures des centrale nucléaires, ces dernières années ont vu la victoire de tous les conservatismes, qu’ils soient nationalistes ou productivistes et l’écologie est mise à mal.

Le monde du passé semble décider toujours et encore de l’avenir.

Les choix qui ont été faits font bien peu de cas de l’avenir des générations futures qui massivement affichent leur attachement à la construction européenne ainsi qu’à la défense de leur environnement.

Nous serons, nous écologistes, dans les années à venir toujours mobilisés aux côtés de celles et ceux qui luttent pour la défense de l’environnement et continuerons à œuvrer, de façon pacifique mais constante, à l’abandon du projet à Notre-Dame-des-Landes. Nos pensées ce soir vont aux centaines d’habitants de Notre-Dame-des-Landes qui demeurent toujours menacés d’expulsion de leurs maisons et de leurs terres.

Je vous remercie