Intervention de Matthieu Theurier au nom du groupe écologiste
En ce mois de mars 2016, il s’est passé quelque chose à Rennes. 1 000 projets proposés, près de 7 000 votants et 54 projets retenus pour un montant de 3,5 millions d’euros, le premier budget participatif rennais est unique en France par son ampleur et la mobilisation citoyenne qu’il a suscité.
Peut-être se souviendra-t-on de ce premier budget participatif comme point de départ d’un changement profond de la démocratie rennaise.
La politique est l’affaire de tou-te-s
Avec la charte de la démocratie locale, il participe à revivifier le débat citoyen à Rennes. Il affirme que la politique est l’affaire de tou-te-s. La force du budget participatif c’est que la parole des habitants se concrétise vraiment et rapidement en actes. L’initiative citoyenne redevient utile et attrayante puisqu’elle permet vraiment de changer la ville. C’est cette force qui fait que le budget participatif est devenu aujourd’hui un acquis démocratique pour les Rennais.
Aussi nous voterons d’autant plus le budget de la Ville de Rennes pour 2016 que pour la première fois dans l’histoire de notre ville, une partie de celui-ci est issu directement d’initiatives citoyennes.
Nous n’oublions pas qu’avant d’arriver là, il aura fallu près de deux années pour convaincre du bien fondé de ce budget citoyen.
Après l’inscription de cette proposition issue du programme Changez la ville dans l’accord de majorité, il aura encore fallu du temps pour convaincre l’ensemble de la majorité municipale, du temps pour convaincre les habitants, du temps pour convaincre l’administration municipale. Mais ce n’était pas du temps perdu.
La refondation de la démocratie locale devient un mouvement continu. Il y a le budget participatif, la charte de la démocratie locale, les États Généraux de la culture et leurs 2 000 participants, la retransmission des conseils municipaux, désormais suivie par près de 1 000 personnes à chaque session. Il y a aussi, et c’est loin d’être anecdotique, la refonte complète de la présentation de notre budget municipal puisqu’il est désormais présenté de façon exhaustive et par actions.
Un budget lisible pour mieux s’approprier la politique
La démocratie c’est aussi l’accès à l’information. Le budget est le document socle de toutes les politiques municipales. Le rendre lisible par tout un chacun, c’est permettre à tous les citoyens de s’approprier la politique. Je disais l’année dernière qu’un effort important était à fournir pour que celui-ci soit rendu plus lisible, je dis aujourd’hui que le contrat est rempli et je tiens, au nom du groupe écologiste, à remercier les services qui, sous l’égide de Marc Hervé, ont fourni un travail remarquable.
Ce que veulent les Rennais ? une ville verte, citoyenne et solidaire !
Le budget participatif, en plus d’être un espace citoyen a un autre atout : il nous permet à nous élus de mieux identifier les attentes des habitants pour leur quartier et pour leur ville. Si l’on regarde les 1 000 projets déposés, que nous ont dit les Rennais ? Ils ont dit qu’ils voulaient une ville plus végétale, qui fasse toute sa place à la nature en ville, qui renoue avec son fleuve et sa rivière. Une ville qui fasse bien plus de place au piétons et aux vélos. Une ville animée d’une vie culturelle diverse au plus près des habitants. Une ville vivante et solidaire.
Les Rennaises et les Rennais qui se sont exprimés à travers le budget participatif veulent une ville solidaire, démocratique et engagée pleinement dans sa nécessaire transformation écologique. Ça tombe bien, nous aussi !
Sur certains aspects, le budget de la Ville de Rennes pour 2016 est, sans surprise, pleinement en phase avec les attentes des habitants. On retiendra notamment que dans un contexte budgétaire difficile, les moyens en faveur de l’éducation et de la culture sont préservés. Le budget consacré aux 5 000 associations rennaises est même quant à lui en augmentation. Les associations sont un élément essentiel de l’action sociale, de la qualité de vie dans notre ville et du lien entre ses habitants. Nous avons insisté sur ce point dès 2015 : conforter le budget aux actions des associations était de notre point de vue une vraie nécessité et elle se concrétise aujourd’hui.
Un fort niveau d’investissement public est toujours maintenu et ce budget 2016 sera aussi bien marqué par l’ouverture du nouveau site des magasins généraux, de nouvelles places en crèche, l’augmentation des produits biologiques dans les cantines, que par de nouvelles infrastructures sportives, la rénovation du parc de logements sociaux des Balkans, l’ouverture d’un nouveau site pour les Restos du cœur, le prolongement du travail pour la rénovation du Blosne, de Maurepas ou encore du Gros Chêne… Autant de projets qui confortent la Ville solidaire à laquelle nous aspirons avec les Rennaises et les Rennais.
Petit bémol quand même…
Sur d’autres aspects, ce budget 2016 ne tire malheureusement pas les enseignements des attentes formulées par les habitants.
Le choix d’imbriquer les 3,5 millions d’euros du budget participatif dans le budget principal fait que les projets retenus par les habitants seront réalisés à moyens constants. Par exemple, les nombreux projets d’aménagement vélo issus du budget participatif pourraient être conçus avec l’actuelle ligne budgétaire de 600 000 euros dédiée au vélo et ce, sans augmentation de cette enveloppe, ce qui pourrait de fait repousser plus tard d’autres projets d’aménagement vélos déjà prévus pour cette année 2016. Au vu des fortes attentes sur ce sujet, la logique voudrait au contraire que les projets des habitants viennent s’ajouter aux projets déjà programmés. Les habitants demandent clairement plus d’aménagement vélos et la réponse que nous apporterions n’irait pas vraiment dans le sens d’une amplification des moyens dédiés à cette politique. Nous avions déjà soulignés cette difficulté.
Les 150 000 euros consacrés à la mise en œuvre des premières actions issues des États Généraux de la Culture apparaissent aussi bien timides au regard des attentes. Il est pour nous essentiel que le budget participatif en 2016 comme pour les années suivantes fasse preuve d’agilité et que des moyens complémentaires puissent venir abonder nos différentes politiques publiques pour tenir vraiment compte des attentes de habitants.
Je ne doute pas que l’adjoint en charge des finances me répondra que la période budgétaire est complexe. J’en suis convaincu et il faut reconnaître le très gros travail de maîtrise des dépenses de fonctionnement réalisé cette année. Mais je sais aussi que des marges des manœuvres existent toujours. Elles dépendent simplement des choix politiques que nous faisons.
Nos charges courantes – énergie et fournitures – sont en baisse de 7 %. Elles peuvent l’être encore plus à travers des actions importantes de réduction des consommations d’énergie.
Il est d’ailleurs plus que temps de desserrer le frein à main sur l’immense enjeu de la transition énergétique et d’engager enfin des moyens pour la production d’énergies renouvelables.
Cette rengaine que je répète à chaque débat d’orientation budgétaire en deviendrait presque comique si l’affaire n’était pas aussi sérieuse. J’en veux pour preuve le commentaire « collector » de notre collectivité sur la proposition faite par un citoyen dans le cadre du budget participatif d’installer une centrale solaire sur l’école Villeneuve. Bonne idée, d’autant que le développement de cette énergie est dans notre programme municipal et vanté dans tous nos documents de campagne. Le commentaire pourtant est le suivant : « projet non pertinent du fait d’un retour sur investissement allant jusqu’à 50 ans. ». Pour le dire franchement, il y a un moment ou il y en a marre.
Si les investissements mondiaux en faveur des énergies renouvelables dépassent aujourd’hui ceux mis sur le nucléaire et les énergies fossiles, c’est qu’il y a une bonne raison économique à cela.
Aujourd’hui, le retour sur investissement du solaire est de l’ordre de 10 à 15 ans et ensuite c’est un revenu qui entre tous les ans dans les caisses de la collectivité avec un tarif de rachat garanti sur 20 ans. Si on veut éviter le ridicule il va falloir réagir et vite.
Les frais de fonctionnement des élus sont en baisse, mais ils peuvent l’être encore plus, simplement en mettant en œuvre une grille d’indemnité plus égalitaire. Les charges liées à la commande publique sont aussi en baisse et pourtant, nous savons qu’il existe encore des possibilités d’optimisation, comme par exemple sur les frais liés aux réceptions et à la communication. Et je veux pour illustrer mes propos prendre pour exemple la Fabrique citoyenne, dont l’ensemble du processus n’aura coûté que 100 000 euros. Les États Généraux de la Culture auront quant à eux coûté 40 000 euros. Des montant somme toute plutôt modestes qui démontrent qu’il est possible d’aller vers les Rennais avec des moyens tout à fait raisonnables.
Les Rennaises et les Rennais nous ont confié une mission pour les cinq années à venir : engager la transition écologique, ne laisser personne au bord du chemin, associer au quotidien les habitants.
À travers le budget participatif, ils ont rappelé clairement ces aspirations. Le budget 2016 de la Ville de Rennes y répond largement. Il nous reste néanmoins encore du travail pour que ces aspirations inondent désormais l’ensemble du budget municipal. Notre chance c’est que, dorénavant, le budget participatif c’est tous les ans. Nous avons donc une dizaine de mois devant nous pour continuer le travail, innover et expérimenter toujours pour ouvrir de nouvelles perspectives et faire de Rennes le laboratoire d’un nouveau modèle démocratique, écologique et solidaire.
|