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Conseil métropolitain Morvan Le Gentil

L’économie de demain sera décarbonée, collaborative et responsable

[Conseil métropolitain du 21 janvier 2016]

Le débat d’orientation budgétaire a eu lieu en conseil de Rennes Métropole. Et nous mesurons le chemin parcouru pour aboutir à un document véritablement politique, qui va dans le sens d’une économie décarbonée, coopérative, collaborative et responsable. Nous avons proposé quelques pistes cependant pour faire encore mieux !

 

morvan_nConseiller métropolitain
Président du groupe écologiste de Rennes Métropole
Intervention de Morvan Le Gentil au nom du groupe écologiste

citationChers collègues,

En ce mois de janvier, le débat d’orientation budgétaire tombe à point nommé pour faire le trait d’union entre les avancées de 2015 et les chemins qu’il nous reste à parcourir.

Les orientations présentées ce soir vont indéniablement dans le bon sens. Dans sa forme tout d’abord, le rapport va largement au-delà d’un simple inventaire, d’un catalogue des projets en cours ou à venir. Au-delà d’un exposé technique comptable, au-delà aussi d’un exercice de communication pour vanter notre « rayonnement » ou notre « excellence ». Il s’agit bien d’un document politique, au sens noble, qui porte une vision et prend acte du moment charnière dans lequel nous nous trouvons.

Ainsi, sur le plan économique nous nous reconnaissons dans cette prise de conscience, que l’enjeu n’est plus à la quête d’une croissance aveugle mais bien à la mutation de notre tissu productif. Il nous faut inventer et accompagner de nouvelles manières de créer de la richesse, d’employer les forces vives, de stimuler les matières grises.

L’économie de demain sera décarbonée, même si la place qu’y tiendra le kérosène fait encore débat entre nous. L’économie de demain sera surtout coopérative, collaborative et responsable, et notre engagement en faveur de l’économie sociale et solidaire y contribuera.

Cet engagement vient d’ailleurs d’obtenir une reconnaissance nationale : notre métropole a été retenue dans le cadre de l’appel à projet gouvernemental portant sur les « Pôles Territoriaux de Coopération Économique », l’équivalent pour l’économie sociale et solidaire des pôles de compétitivité.

Les autres piliers du développement durables ne sont pas oubliés dans les déclinaisons thématiques. Les solidarités, la cohésion sociale, la transition écologique sont ainsi affichées clairement, et avec eux une série de programmes concrets et opérationnels :

  • un Programme local de l’habitat (PLH) ambitieux : pour des logements adaptés à toutes les bourses, pour des maisons passives dans toutes les communes, et pour une rénovation de grande ampleur dans l’habitat ancien ;
  • un Plan de déplacements urbains (PDU) remobilisé sur les questions de mobilités douces : le covoiturage, le train pour les déplacements domicile-travail avec l’étude « TREM », les déplacements vélo avec la préfiguration d’une « Maison du vélo »
  • Mais aussi un Plan climat air énergie territorial (PCAET), un Contrat de Ville, autant d’outils structurants qui apportent leurs moyens et leurs synergies au service d’un développement équilibré de notre territoire.

Nous pouvons être fiers, collectivement, de ces jalons posés mois après mois. Cela étant, des axes restent encore à défricher, en creux, dans ce débat d’orientation budgétaire.

 

N’oublions pas la jeunesse

J’évoquais à l’instant la cohésion sociale : au premier rang des préoccupations dans ce domaine, la jeunesse sera à coup sûr le thermomètre de notre société. Or il nous manque aujourd’hui une dynamique d’ensemble sur ce plan. Nous savons, bien sûr, que ce sont les communes qui en ont la compétence, le débat n’est pas là. Mais nos politiques métropolitaines, notamment d’habitat social, luttent à raison contre la concentration des difficultés sur certains quartiers : cela amène de nouvelles problématiques dans les communes, tous les CCAS le constatent je crois. Il faut prendre la mesure de ce virage, et nous pensons que la Métropole peut avoir une plus-value dans la construction des réponses, en soutien technique, en animation de réseau, en montée en compétence des équipes, en coordination des actions… sans nous substituer aucunement aux communes, nous pouvons contribuer davantage à la qualité des soutiens proposés aux jeunes. Cela demande toutefois des moyens qui ne ressortent pas, en l’état actuel, du débat d’orientation budgétaire.

 

Mettre encore l’accent sur les énergies renouvelables

Le chapitre dédié au déploiement des énergies renouvelables gagnerait également à être enrichi : puisqu’il est indiqué que nous « mobiliserons l’ensemble des outils à disposition » dans ce domaine, pourquoi nous limiter aux réseaux de chaleur ? « L’évaluation du potentiel » pourrait concerner tous les types d’énergies renouvelables, et le solaire notamment être davantage stimulé – y compris en mettant en place des dispositifs de tiers financement.

Impliquer les habitants

Cela fait le lien avec une piste que nous souhaiterions approfondir, autour de la participation des habitants aux politiques métropolitaines. Nos décisions sont réputées techniques, difficiles d’accès voire absconses, mais elles sont pourtant ancrées dans le quotidien – et de plus en plus avec nos nouvelles compétences. Qu’attendons-nous pour faire aboutir notre engagement d’une retransmission vidéo de nos conseils ?

Une bonne manière de dépasser ce déficit de notoriété pourrait être d’expérimenter les budgets participatifs, dans le prolongement de l’initiative rennaise.

Des champs comme l’énergie ou les mobilités en seraient des supports particulièrement pertinents.

 

 

Soutenir l’agriculture locale et biologique

Un autre aspect que nous voudrions voir davantage souligné a trait à la richesse périurbaine et rurale de notre agglomération.

Notre agriculture doit s’inventer un avenir et il faut que notre Métropole s’y implique, autrement que par le financement de programmes de recherche parfois discutables.

Le soutien à la structuration des circuits courts, à la production biologique, à la refonte des filières d’approvisionnement de nos collectivités, sont quelques voies à tracer. À terme, cette logique de filières locales, pour l’alimentation mais aussi le bois, doit s’imposer comme un pivot du lien ville-campagne, point fort de notre territoire.

Valoriser le périurbain

Le périurbain est bien loin de n’être qu’un dortoir, et sa mise en valeur pourrait d’ailleurs trouver une traduction plus forte dans l’expression de notre projet touristique.

Pour tout dire nous nous sentons un peu à l’étroit dans cette vision d’un tourisme « vecteur de croissance », centré sur un triptyque « cadres supérieurs / transport aérien / patrimoine rennais ». Il y a sans doute là un gisement à exploiter, mais nous voudrions que nos moyens soient mis aussi sur un tourisme accessible à tous, un tourisme de proximité, un tourisme à la découverte des mille opportunités de nos 43 communes. Et si vraiment l’analyse économique doit être au cœur de nos réflexions – elle l’est, bien sûr, nous sommes dans un débat d’orientations budgétaires – alors n’oublions pas d’y intégrer les perspectives d’évolution de la taxe de séjour, puisque celle-ci devait être retravaillée courant 2015.

S’engager contre les paradis fiscaux

Cela me fait une transition vers le volet purement financier du débat. Je ne serai pas long, la présentation de Mme Andro était claire et sans véritable révolution par rapport à nos récents débats sur la prospective financière. La situation de notre métropole est des plus saines, le pari de la modération fiscale pourrait être tenu, et même un investissement gigantesque comme la ligne B du métro nous amène finalement des bonnes surprises et des marges. Nous partageons donc la sérénité affichée ce soir.

Nous souhaitons toutefois exprimer une suggestion et pointer une divergence.

Réticence en effet, concernant la tentation d’ériger la stabilité des effectifs et des coûts afférents comme un dogme. Dans la période qui est la notre, avec l’intégration de nouvelles compétences et l’émergence de nouveaux enjeux (j’évoquais la jeunesse, les filières de production locale, la transition énergétique…) nous devrons continuer à développer notre capacité à innover, animer, piloter. La constance indiquée dans ce débat d’orientation budgétaire 2016 se comprend au regard de la nécessité d’absorber les changements récents, mais à terme n’hésitons pas à nous réinterroger, sans tabou, sur l’adéquation entre objectifs et moyens – sous peine de dégrader la qualité de travail de nos équipes.

Notre suggestion porte sur le détail de l’encours par prêteur. Nous le voyons, des organismes publics comme la BEI ou la Caisse des Dépôts occupent une part importante dans notre dette. Mais ce ne sont pas les seuls, et parmi les autres organismes nous savons que certains ont encore des difficultés à rompre avec leurs habitudes anciennes liées aux paradis fiscaux. Nous avons tous ici, je pense, conscience du caractère délétère de ces pratiques. Notre collectivité doit jouer un rôle de transparence et d’aiguillon en la matière.

Un premier pas pourrait être de publier, en face de nos lignes de crédit, les comptes détenus par nos partenaires bancaires dans les paradis fiscaux. Un deuxième serait d’afficher notre détermination à lutter contre ce fléau, par exemple à travers un vœu que notre groupe se propose de soumettre à cette assemblée dans les mois à venir.

 

 

Soutenir les associations

Notre divergence, maintenant, est relative au poste des subventions.

Nous voulons réaffirmer ici que les subventions aux associations, ces stabilisateurs et relais essentiels, ne doivent pas être une variable d’ajustement : même en situation de budget tendu, le maintien, a minima, du budget global de nos soutiens aux associations est un impératif.

Cela ne veut pas dire que, par exception, certaines subventions ne peuvent pas être revues à la baisse, comme ici l’Audiar et l’Espace des Sciences, structures para-publiques. Nous le comprenons, mais au-delà de ces cas particuliers, nous appelons à la prudence quant aux lectures trop rapides sur les trésoreries associatives, qui sont souvent une condition de survie pure et simple lorsqu’un financement important tarde ou est remis en cause. A contrario d’ailleurs, on pourrait probablement identifier bon nombre d’associations dont la trésorerie est aujourd’hui insuffisante et qui, en miroir à la logique prévalant pour l’Audiar et l’Espace des Sciences, auraient au contraire besoin d’une rallonge – jamais évidente à négocier.

À titre d’exemple on pourrait citer la Maison de la Consommation et de l’Environnement ou l’Agence Locale de l’Energie : dans le contexte déjà évoqué de mobilisation générale sur les enjeux écologiques, Rennes Métropole demande davantage à ces partenaires mais n’accroît pas pour autant le montant de son financement, alors que leurs frais de fonctionnement peuvent augmenter ou que certains soutiens se tarissent – de la part de l’État notamment.

Nous appelons donc ici à donner la priorité à une réaffectation de nos crédits éventuellement superflus vers d’autres actions d’intérêt collectif, plutôt qu’à une contraction, symboliquement gênante et improductive face aux besoins de nos concitoyens.

En tout état de cause, pour éclairer cette question il nous semblerait utile d’établir, dans le processus d’élaboration budgétaire, une liste complète et détaillée de nos subventions et de leurs évolutions, depuis 2014 jusqu’au prévisionnel 2016.

Nous espérons pouvoir retravailler prochainement ensemble sur cette petite épine, et redisons, dans cette attente, notre convergence globale avec les orientations développées ici.

Je vous remercie.

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