[Conseil municipal du 16 septembre 2019]
Les écologistes ont soumis au vote du conseil municipal un vœu cosigné aussi par l’UDB et la FI engageant la ville vers la fin des pesticides. Après de longs débats, le vœu a été adopté, à l’exclusion de l’alinéa 4 concernant la prise d’un arrêté d’interdiction des pesticides de synthèse.
Co-président du groupe écologiste à la Ville de Rennes Vice-président de Rennes Métropole en charge de l’ESS et des écoactivitésTélécharger le voeu proposé par les écologistes cosigné par l’UDB et la FI |
Intervention de Matthieu THEURIER au nom du groupe écologiste et citoyen Le 18 mai 2019, Daniel Cueff, le Maire de Langouët, commune située au nord de Rennes, a pris un arrêté proscrivant sur son territoire l’utilisation de pesticides à une distance inférieure à 150 mètres de toute parcelle cadastrale comprenant un bâtiment à usage d’habitation ou professionnel. Le Tribunal administratif de Rennes a suspendu cet arrêté le 27 août 2019. Le jugement rendu ne se prononce pas sur le fond du problème mais bien sur une question de forme. Le débat sur l’utilisation des pesticides reste donc entier et de plus en plus de communes en France prennent des arrêtés similaires. Les études s’accumulent pour prouver la nocivité des pesticides de synthèse pour l’environnement mais aussi pour l’Homme. Les « pisseurs involontaires de glyphosate », ces citoyennes et citoyens qui se soumettent volontairement à des dépistages de pesticides dans les urines, reçoivent tous des analyses alarmantes. Les témoignages d’agriculteurs développant des pathologies graves liées aux pesticides se font toujours plus nombreux. La situation est plus que critique. Il est de notre devoir d’élu.e.s locaux, de prendre nos responsabilités pour protéger la santé des habitant.e.s. C’est pourquoi, à travers ses politiques de santé, de commande publique et d’agriculture, et en écho au vœu voté à l’unanimité au conseil municipal de juin 2019 décrétant l’état d’urgence climatique, la Ville de Rennes est engagée pour favoriser un modèle agricole respectueux de la santé de toutes et tous. Aujourd’hui, il nous faut amplifier cette stratégie. Cela passe notamment par une évolution des législations nationales en matière d’utilisation des pesticides. Aussi, par ce vœu que le groupe écologiste propose avec les groupes UDB et LFI, la Ville de Rennes : – demande au Gouvernement de définir une législation concernant l’exclusion de l’utilisation des pesticides à proximité les lieux d’habitation et de loisirs ainsi que des établissements scolaires ; – s’engage à définir, avec la métropole, une stratégie alimentaire et foncière à l’échelle métropolitaine avec pour objectif une transition agricole de son territoire menant vers l’agriculture biologique ;
À ce jour, la Ville de Rennes dispose de 500 hectares agricoles dont 37 % en bio. Passer à 100 % est un objectif parfaitement atteignable dans un temps court. D’autant plus qu’avec la bonne nouvelle de vendredi qui a vu le projet de la Collectivité Eau du Bassin Rennais être retenu par l’État – et j’en profite pour saluer le travail de toute l’équipe CEBR – nous disposerons de 22 millions d’euros supplémentaires pour accompagner les paysans dans des démarches de transformation rapide de leurs pratiques. Par ce vœu, nous prenons un engagement concret en termes d’objectifs, de moyens et de délais pour faire de notre ville l’une des premières de France à disposer d’une agriculture 100 % bio. – enfin, par ce vœu, la Ville de Rennes décide de rejoindre le mouvement des collectivités engagées en prenant un arrêté d’interdiction d’épandage dans les 150 mètres autour des habitations. Après Langouët, ce sont plusieurs communes de France qui se sont engagées dans cette voie, et récemment nous avons pu saluer l’engagement commun de Nantes, Lille, Grenoble, Clermont-Ferrand et Paris. Je tiens à préciser que nous avons déposé ce vœu le 9 septembre dernier, avant le Space mais dans la foulée de la décision du tribunal. Entre temps, vous avez eu l’occasion de vous exprimer Madame La Maire, et vous avez affirmé votre opposition à la prise d’un tel arrêté qui relève pleinement de vos pouvoirs. Nous avons donc je le sais un désaccord sur ce point, je me permets d’y insister cependant car pour nous la question d’un arrêté n’est pas symbolique, elle participe du combat global qu’il nous faut mener contre le lobby des pesticides et qui passe aussi par le combat juridique. Les salariés de l’agro-alimentaire qui se battent devant la justice depuis des années dans le cadre de l’affaire Nutréa-Triskalia pour faire reconnaître comme professionnelles leurs maladies liées à une intoxication aux pesticides savent l’importance qu’il y a aussi à solliciter le pouvoir judiciaire, lorsque les pouvoirs exécutifs et législatifs ont démissionné de leur devoir de protection des populations.
Il n’est pas anodin non plus, par cette prise d’arrêté, de mettre en débat la question des compétences des collectivités. Nous, ville et métropole, devons être à l’avant-garde de la protection de la santé de nos habitant·e·s. Alors oui, nous revendiquons des compétences en la matière et donc y compris sur les questions agricoles. Aujourd’hui, c’est l’Europe via la PAC et l’État, qui mène la danse. Et nous en connaissons les résultats : le plan Écophyto initié par l’État en 2008 avait comme objectif phare la réduction de moitié de l’usage des pesticides à l’horizon 2018. Lors du bilan à 10 ans, le constat est le suivant : l’utilisation des pesticides a augmenté de 22 % malgré 700 millions d’euros de subventions aux filières agricoles. Il est certain que nous sommes tous aujourd’hui capables de nous accorder sur un objectif de territoire sans pesticides, tant à l’échelle de la Ville qu’à celle de de la Métropole. Et c’est une bonne nouvelle. Il y a encore quelques années, nous n’aurions même pas eu ce débat ici. Mais sans revendiquer fortement des compétences en la matière, sans affirmer aussi des objectifs clairs, datés et chiffrés, les déclarations de bonnes intentions, aussi importantes et essentielles soient-elles resteront des vœux pieux. Cela fait plus de vingt ans que la questions des pesticides est sur la table, cela fait dix ans que l’on nous assène que oui oui on va en sortir et que rien ne se passe.
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