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Conseil municipal Valérie Faucheux

L’utopie : notre énergie pour un nouveau monde

[Conseil municipal du 30 janvier 2017]

Trump, brexit, Alep. Pollution de l’air, dérèglement climatique. Pauvreté, inégalités, exclusion… Nous aurions pu nous lamenter sur le monde qui va mal. Mais non. Aujourd’hui c’est l’utopie que nous cultivons, avec les Rennais-e-s, pour construire le monde que nous voulons.

 

Conseillère municipale

Intervention de Valérie FAUCHEUX au nom du groupe écologiste 
 

citationEn 2016 et en ce mois de janvier 2017 les spasmes de notre vieux monde en mutation produisent un certain nombre de soubresauts, dont nous ne pouvons guère être fiers. La mise au pas de la démocratie grecque par le trio FMI-BCE-Commission européenne, l’abandon du peuple syrien dans les mains de son bourreau, le Brexit et l’élection de Donald Trump. Autant de signes annonciateurs de l’incapacité de nos vieilles démocraties libérales (dans le sens de Tocqueville) à maintenir un ordre mondial qu’elles ont fondé.

Ces derniers mois et semaines, un certain nombre de focus apportés par des associations, ONG et collectifs sur l’état de notre monde le décrivent en bien mauvaise posture.

 

15 % de pauvres à Rennes

Le rapport annuel d’Oxfam publié début janvier dresse un constat toujours plus accablant sur l’accumulation sans précédent des richesses entre quelques mains. Ils sont 8. Et à eux seuls, ces 8 milliardaires cumulent une fortune de 426 milliards de dollars, l’équivalent des richesses détenues par la moitié la plus pauvre des habitants de la planète.

Parmi ces 8 : Bill Gates, Michaël Bloomberg, Warren Buffet, Mark Zuckerberg… Ce n’est pas un hasard si ces huit « maîtres du monde » sont souvent à la tête de firmes qui bénéficient de défiscalisation et profitent de l’évasion fiscale.

Et les résultats désastreux sont très concrets. En France, 9 millions de nos concitoyens vivent au-dessous du seuil de pauvreté, un tiers d’entre eux sont des enfants. Et les plus pauvres parmi eux sont les migrants, loin de l’image de profiteurs, que l’on nous assène à longueur de journée.

À Rennes, l’Insee estime à 15% le taux de pauvreté.

À l’heure où certains ne pensent qu’à faire sauter l’ISF, mettre au rebut notre couverture sociale, les rapports des associations caritatives nous rappellent que ces refrains consistent à prendre toujours davantage aux plus fragiles, aux plus miséreux, pour le redistribuer aux plus opulents, qui sont les vrais assistés de notre monde.

103 ans après l’instauration de l’impôt progressif sur le revenu par la gauche du moment, avec Jaurès en tête, il est étrange d’entendre proposer le CICE, le pacte de responsabilité comme seule alternative à la crise économique et sociale par celles et ceux qui se revendiquent de son courant de pensée.

 

La pollution de l’air tue

Dans le registre « le Monde va mal », le second point concerne bien entendu notre environnement. Selon un rapport publié en novembre dernier, l’Agence européenne de l’environnement estime à 500 000 le nombre de morts dues à la pollution atmosphérique. Nous le rappelons sans cesse : les particules fines rendent malade, tuent et diminuent l’espérance de vie. En France, ce sont 48 283 décès par an.

À Rennes, les décès prématurés à imputer à la pollution de l’air se compte au nombre de 100 chaque année. On ne le répétera jamais assez : à cause de cette pollution, un individu de 30 ans a désormais deux ans d’espérance de vie en moins.

Réduire les gaz à effet de serre, c’est aussi atténuer les effets du réchauffement climatique. 2016 est l’année la plus chaude jamais enregistrée, elle a connu l’accélération de la fonte de la banquise arctique sans précédent. Deux signes parmi d’autres d’une probable accélération, voire d’un risque d’emballement des dérèglements.

 

Cultiver l’utopie

 

Nous pourrions nous arrêter sur cette vision du monde extrêmement pessimiste. La raison de notre existence en tant que femmes et hommes politiques n’est pas de cultiver la dépression ambiante et d’accompagner ainsi les pires visions réactionnaires. Les raisons d’espérer et surtout d’agir sont déjà en germe, à nous de les cultiver avec les habitants et les citoyens.

Des idées fourmillent. Et au-delà des idées, se dessinent les axes d’une politique au service de l’humain et de l’environnement. L’association Negawatt vient de réactualiser le scénario qui permettra d’entrer dans la nécessaire transition énergétique. Réduction des consommations, rénovation des bâtiments et développement énergies renouvelables sont les trois piliers de ce scénario qui, outre de nous permettre d’atteindre les objectifs environnementaux fixés par la COP 21, est une des solutions de relance de l’économie permettant la création massive d’emplois. Pour mémoire, quand un investissement crée 1 emploi dans le nucléaire, le même en crée 3 dans les énergies renouvelables.

En matière sociale et écologique, les Rennaises et les Rennais nous transmettent leurs aspirations qui correspondent bien souvent à des réponses aux enjeux que je viens d’évoquer.

Au printemps dernier, la loi Travail a poussé dans la rue des milliers de personnes, dont principalement des jeunes, rejetant les vieilles recettes qui consistent à démanteler le code du travail, à précariser plus pour résoudre une crise dont ils ne sont pas responsables.

De plus, par leur participation au débat sur le projet urbain Rennes 2030, les Rennais-e-s souhaitent que soit accordée davantage de place à la nature en ville.

Les budgets participatifs ont montré le désir d’écologie des habitants et les projets de cette deuxième édition marquent leur engagement : pistes cyclables, jardins partagés, panneaux solaires, zones à 30 Km/h, créations d’espaces boisés en ville, installations ludiques sur l’espace public…

Enfin, l’engagement des habitants de notre ville en faveur des plus démunis et notamment des migrants est un gage de leur résistance à tous les racismes et politiques de rejet.

La mobilisation associative initiée par Un Toit c’est un droit, la Fondation Abbé Pierre, le Secours Catholique et le CCFD Terres Solidaire doublée de l’implication citoyenne des habitants de la Poterie, d’étudiants, de collectifs d’artistes, en nous interpellant, a permis de mettre à l’abri plus de 160 personnes dont 70 enfants. Et c’est l’honneur de notre Ville d’avoir su mobiliser les moyens juridiques et financiers nécessaires pour les soutenir, et permettre cet accord avec le promoteur immobilier. À cette heure, nous nous interrogeons toujours sur la capacité des services de l’État à agir sur cette question alors qu’il en a les moyens. Quand la préfecture d’Ille-et-Vilaine va-t-elle décider l’ouverture du centre d’hébergement d’urgence pour lequel Emmanuelle Cosse a attribué des crédits en juin dernier ? Il y a fort à parier qu’un changement de gouvernement pourrait remettre en cause ce projet et surtout jeter à la rue en juillet prochain les résidents des Jardins de la Poterie. Nous devons dès maintenant renouveler notre soutien pour qu’ils obtiennent une solution de relogement dès juillet et la régularisation tant attendue.

 

Tous ces exemples sont révélateurs de la capacité des habitants à résister à la sinistrose, de leur volonté de construire un monde plus équitable et plus écologique.

 

Notre rôle ici à tous est de comprendre au plus près les problèmes et d’entendre celles et ceux qui portent des initiatives qui peuvent être des débuts de solutions. Celles basées sur l’austérité et la contrainte pour la faire appliquer à coup d’état d’urgence, de loi sur la déchéance de nationalité sont celles d’un monde déjà ancien, qui n’a qu’un objectif : maintenir le pouvoir de ceux qui le dominent, au détriment des nouvelles générations.

Alors oui nous assumons nous aussi d’être idéalistes, à l’instar de tous ces Rennais issus du peuple de gauche qui sont allés voter à la primaire socialiste ce week-end.

Nous ne sommes pas adeptes des credo libéraux, du nécessaire redressement des comptes de la nation, discours qui n’inventent pas les solutions de demain mais continuent à accélérer la crise économique, sociale et démocratique. Comme Oscar Wilde nous portons haut et fort l’idée d’un progrès comme « l’accomplissement des utopies. »