Si les trois premiers mois semblent s’éterniser sur un mandat qui débute, le cycle de la première année surprend pour sa part quand il se solde. La semaine de permanence que tout-e élu-e de la majorité doit à sa commune sanctionne ce cycle avec une certaine gravité. Cela fait deux fois que je vis l’expérience, et pour ma part je ne m’y fais pas. Je crois, avouons-le, que je ne veux pas vraiment « m’y faire ».
Imprévisible est la vie d’une cité… pendant une semaine, je suis la Maire, ou soyons modeste, je suis adjointe à Madame la Maire, pour garantir une présence politique directe aux concitoyen-ne-s et à leurs soucis quotidiens.
Un inventaire à la Prévert n’y suffirait pas, les Rennais-e-s sont étonnant-e-s, les occasions cocasses se succèdent, les émotions aussi.
Une semaine de permanence d’élue, c’est quoi ?
C’est une bonne dose d’amitié des secrétaires et des agent-e-s de la mairie, des huissier-e-s, toujours disponibles, facilitant nos démarches, accompagnant nos arrivées matinales comme nos départs inquiets (avec le portable d’astreinte dans la poche).
Ce sont les passages des autres élu-e-s de la majo pour un petit salut d’encouragement ; la prochaine fois ce sera leur tour, ils-elles comprennent. Et chacun y va de sa petite histoire, de son témoignage éclairant, des petits mots qui fédèrent une équipe municipale, capable de partager le même vécu, même quand les vues sont, sur plus d’un sujet, aux opposés politiquement.
Nos visiteur-se-s sont aussi des copines et copains du groupe local EELV, qui viennent voir et se payer notre « tête sérieuse » d’élu-e, nous offrir des chocolats, discuter entre deux courses en ville.
C’est surtout une présence en mairie de 9h30 à 11h30 et de 14h à 16h pour accompagner la résolution de gros et de petits tracas rennais.
Ici les tags pullulent de façon excédante, là les bonnes volontés se heurtent au mur administratif… constamment il s’agit d’écouter, toujours offrir et faire suivre les informations.
Les problèmes peuvent être lourds, comme celui de ces personnes expulsées un matin par décision de justice à l’encontre de leur logeur illégal. L’un n’a pas les moyens de se payer un billet de train pour rejoindre ses parents, l’autre perd l’adresse fixe qui lui permettait d’assurer la visite de ses enfants dont elle a perdu le droit de garde.
J’appréhende d’avoir un jour à jouer la messagère de mauvaises nouvelles, l’Hermès honni et me tracasse à l’avance.
Entre temps, les choses peuvent se « pimenter », voilà par exemple l’intrusion surprise d’un homme éméché, dont le pantalon manifestement n’est retenu par aucune ceinture…, les policiers interviennent ; voilà une manifestation sur la place frappant des bidons à crever les tympans et rendant impossible, deux heures durant, un accueil bien « à l’écoute »…
Ce sont des célébrations de mariage civil et de parrainage républicain. Cette semaine, j’en célébrerai plus que lors de ma précédente semaine. Aucun-e autre élu-e n’ayant été nommément réclamé-e par les personnes, j’aurai donc la pleine mission de toutes les célébrations. Samedi, je me prépare d’ailleurs à un petit marathon, mais certain-e-s collègues ont vu pire, à un rythme de fou (ou de folle comme on voudra), certains vendredis et samedis, aux beaux jours. Le mois d’octobre est, reconnaissons-le, plus dissuasif pour les mariages, en revanche, pour les parrainages il n’y a pas de saisons.
L’un de ces baptêmes – je le sais – me bouleversera, plus que les autres, et j’en changerai mes mots d’introduction pour accueillir avec grande humilité l’histoire peu commune de cette famille, la générosité de ces personnes les unes pour les autres, toutes réunies autour d’un enfant auquel ils signifient, par ce jour de fête, combien il compte pour eux.
Les verres de la lorgnette d’une élue stressée sont certes déformants, et aucun-e élu-e ne les porte de la même façon. Mais même inquiète durant tout le temps qu’elle dure, je suis honorée par la fonction d’élue de permanence.
Je reconnais que j’ai hâte que ces jours soient passés, pourtant je sais aussi que je me porterai facilement volontaire pour remplacer les collègues élu-e-s au besoin…
Cette situation est in fine celle de l’engagement.
Cette semaine est – s’il en est besoin – la piqûre de rappel de nos responsabilités.
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