Conseil municipal du 2 décembre 2024 : Intervention portée par Laurent Hamon au nom des élu·e·s écologistes et citoyen·ne·s |
Madame la Maire, mes chers collègues,
Je tiens tout d’abord à m’adresser aux Rennaises et aux Rennais. Nous, écologistes, avons pleinement conscience de l’ampleur du narcotrafic qui sévit à Rennes, tout comme dans de nombreuses autres villes. Le ministre de l’Intérieur lui-même l’a reconnu. Nous savons à quel point cette situation impacte profondément votre vie quotidienne : la peur d’être au mauvais endroit, au mauvais moment, ne pas pouvoir dormir, être constamment sur ses gardes, se replier chez soi, se sentir abandonné. Et sachez que nous ne restons pas inactifs face à cette réalité.
Nous sommes là, et nous sommes bien là, sur le terrain, à vos côtés, chaque jour, pour lutter contre ce fléau. Nous mettons tout en œuvre pour apporter des solutions concrètes, renforcer la tranquillité et travailler en étroite collaboration avec tous les acteurs concernés. Vous n’êtes pas seuls face à ce défi, nous sommes avec vous, déterminés à faire reculer ce fléau et à rendre Rennes plus sûre pour toutes et tous.
Je souhaiterais désormais répondre aux collègues de l’opposition, notamment sur l’armement de la police municipale. Mes chers collègues, contrairement à vous, nous ne sommes pas dogmatiques sur ce sujet. Mais nous le disons, c’est une fausse solution, je dirais même une fausse promesse, qui ne ferait que créer des attentes irréalistes !
Irréalistes aussi bien pour la population que pour nos agents. Il faut arrêter de faire croire que ce serait le rôle de la police municipale de protéger les habitants contre les narcotrafiquants. Tout comme pour protéger nos agents, il suffit, de ne pas les envoyer dans des situations qui relèvent de la compétence exclusive de la police nationale. S’il y a des bougées législatives, la question se reposera, mais en l’état actuel, nous sommes opposés à l’armement létal de la police municipale, et nous déplorons, d’ailleurs, le choix du Maire de Bordeaux qui ne fait pas l’unanimité, soit dit en passant.
Un policier municipal armé ne dissuadera pas un narcotrafiquant de tirer. La preuve, à Maurepas, même avec la présence de la CRS 82, une force spécialisée, les tirs ont continué en plein jour. Arrêtons donc de jouer les gros bras avec des postures martiales. Concentrons-nous sur les causes structurelles, comme l’ont très bien exprimé une dizaine d’associations à l’échelle de Maurepas dans une récente tribune, riche en analyses et solutions, et je tiens à le préciser que nous soutenons. Nous saisissons d’ailleurs cette occasion pour remercier l’investissement des habitants, associations, agents et commerçants.
Doter la police municipale d’armes à feux, ce serait céder à une course à l’échalote qui instrumentalise la police municipale. Le rôle de la police municipale, n’est pas de venir en renfort de la police nationale, et encore moins de s’y substituer. Elle doit demeurer au service des politiques publiques de la ville, en proximité et en confiance avec les habitants.
Par ailleurs, nous le redisons, nous ne sommes pas opposés à l’installation ponctuelle de caméras, notamment mobiles. C’est une proposition que nous faisons depuis longtemps. Mais nous refusons la généralisation excessive des caméras, qui ne sont qu’un écran de fumée pour masquer des lacunes de l’État en matière de sécurité.
Je le redis, s’il faut recruter ici ou là quelques policiers municipaux supplémentaires, nous sommes prêts à regarder. Cependant, dans le contexte financier actuel, devenu intenable, en raison des coupes budgétaires du gouvernement, nous devons, nous élus locaux, être responsables dans la gestion de nos ressources humaines. Notamment en veillant à ce que les autres services municipaux puissent bénéficier des recrutements dont ils ont besoin.
Et puis… Je pose la question à l’ensemble des membres de ce conseil municipal. Qui avez-vous envie de mettre en face des jeunes dans les quartiers ? Un policier municipal armé ? Vraiment ? N’y a-t-il pas quelque chose d’anormal à vivre constamment avec la police dans son quartier ? Est-ce vraiment ainsi que nous allons leur offrir de meilleures perspectives d’avenir ? Nous sommes pour un équilibre, il faut des policiers municipaux, mais il faut aussi des postes pour l’éducation, la prévention, la médiation et la santé. Oui, la lutte contre le narcotrafic, est une bien aussi une question de santé publique, et il faut le regarder en face.
Aussi, nous nous inquiétons des récentes annonces de l’État sur la fin du financement de plusieurs postes d’éducateurs dans les quartiers populaires de Rennes. Cela illustre, une fois de plus, un désengagement constant de l’État sur des enjeux pourtant cruciaux. La politique de prévention devrait être au cœur de notre réponse à la violence et au narcotrafic.
En parallèle, nous proposons que la Ville de Rennes lance une grande campagne de prévention, non pas pour culpabiliser les consommateurs, ce qui serait inefficace pour changer les comportements, mais pour les informer des dangers et des accompagnements possibles.
Pour accompagner les consommateurs de drogue, pour réduire les risques et leurs pratiques addictives, nous devons enfin briser le tabou autour des Halte Soins Addiction (HSA) et déposer une candidature pour en ouvrir une à Rennes. Aussi, les écologistes le répètent depuis des années, et je constate que les lignes bougent sur tous les rangs politiques, la question de la légalisation et dépénalisation doit être mise sur la table.
Mais tout cela ne suffira pas si l’État ne prend pas ses responsabilités. La visite du ministre de l’intérieur nous a franchement laissé sur notre faim. La Cour des comptes, a récemment déploré les mauvais résultats du gouvernement sur ces dernières années en matière de narcotrafic.
Ce dont nous avons besoin, c’est d’une stratégie interministérielle, dotée de moyens conséquents. Notamment pour renforcer les effectifs policiers et judiciaires, y compris au niveau local, tout en améliorant leur coordination. Enfin, la coopération internationale, notamment avec les territoires d’outre-mer, est cruciale pour lutter contre ce fléau, qui ne connaît pas les frontières.
Face à l’ampleur du problème du narcotrafic et de la violence, il est impératif de ne pas céder aux fausses solutions démagogiques et inefficaces, aux fausses promesses électorales. Ce dont nous avons besoin c’est d’une réponse globale et coordonnée. Nous, écologistes, continuerons à défendre une approche équilibrée, pragmatique et juste. Alors, Rennaises, Rennais, soyez assurés que nous restons pleinement engagés à vos côtés pour une ville plus sûre et plus solidaire. Je vous remercie,
– Seul le prononcé fait foi –