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Face au déni démocratique et à l’inaction de l’Etat, des collectivités remparts

Conseil municipal du 16 Septembre  2024 · Intervention de Politique Générale portée par Lucile Koch au nom des élu·e·s écologistes et citoyen·ne·s

Madame la Maire, mes chers collègues, 

En tant qu’élu.e.s locaux écologistes, notre action quotidienne auprès des habitants vise à redonner foi en la parole politique et confiance en l’action publique. Nous voulons démontrer que la parole des citoyens est entendue et prise en compte, que la politique peut améliorer la vie des gens. C’est pourquoi, en tant qu’élus locaux écologistes, nous sommes tout simplement écœurés des dernières décisions présidentielles qui vont à l’encontre du vote des français.

A quoi bon appeler les citoyens au vote si c’est toujours le même qui décide à la fin, à savoir le Président Macron ? Avec sa “trève démocratique” estivale, avec la nomination d’un Premier Ministre issu d’un groupe représentant à peine 8% des députés de l’Assemblée nationale, il ne s’y serait pas mieux pris pour décrédibiliser encore davantage la parole politique, aggravant la crise de confiance entre citoyens et institutions publiques.

Et qui sort gagnant de la séquence ? Encore et toujours l’extrême droite, qui a adoubé Michel Barnier en s’engageant à ne pas le censurer. Honte absolue pour un Premier Ministre dont la longévité dépendra du bon vouloir de l’extrême-droite. Honte absolue pour un Premier Ministre qui en 1985 vote contre la dépénalisation de l’homosexualité ; qui en 2021 reprend des propositions de l’extrême droite dans sa campagne pour les primaires des Républicains comme le moratoire sur l’immigration, la lutte contre l’assistanat ou encore le rejet des éoliennes ; et qui en 2024, n’a pas appelé au barrage républicain contre le rassemblement national. 

Si au soir du 7 Juillet, nous avons tous ressenti un immense sentiment de soulagement lorsque le Nouveau Front Populaire battait l’extrême droite en arrivant en tête des élections législatives, nous n’oublions pas que le combat est loin d’être terminé, que l’extrême-droite n’a jamais été aussi forte : elle ne s’invite plus, elle s’installe. Nous devons continuer de la combattre sans relâche. 

Saluons la mobilisation exceptionnelle, en particulier de la jeunesse, le 7 septembre dernier, partout en France et en particulier à Rennes, descendue dans la rue pour dénoncer ce déni démocratique. 

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En attendant, force est de constater que dans de nombreux domaines, l’État n’est plus au rendez-vous de ces obligations. La crédibilité de l’action publique s’en trouve affectée. En matière de services de santé, mais aussi d’hébergement d’urgence, de sécurité, d’éducation, d’accès au logement ou à l’alimentation, les carences de l’État dans la mise en œuvre de ses obligations impactent chaque jour la vie des habitants de notre territoire.

Sur la sécurité d’abord : nous sommes loin d’être dans le déni, comme certains voudraient le faire croire. Nous sommes particulièrement préoccupés par le trafic de drogues qui empoisonnent nos quartiers, qui génère des violences et des agressions inacceptables.

Mais comme dans d’autres territoires, notre ville souffre d’un manque criant d’effectif en matière de police nationale de proximité. Disons-le, ce ne sont pas les nouveaux postes de l’an dernier qui vont répondre aux besoins de présence sur le terrain, car ils n’ont même pas compensé les départs et les mutations. Notre collectivité, elle, a fait des efforts en créant 40 nouveaux postes de police municipale. Mais où sont les effectifs supplémentaires promis il y a maintenant deux ans par le Ministre de l’intérieur Darmanin, notamment sur la brigade de sécurisation des transports à Rennes

En matière de sécurité routière, même déception. Certes, le constat préoccupant est partagé sur la hausse du nombre de morts en Ille-et-Vilaine, dont la moitié sont des “usagers vulnérables” : conducteurs de deux roues, piétons ou cyclistes. L’alcool et les stupéfiants sont en cause pour plus de 35% des accidents mortels dans notre département.

La réponse répressive de la Préfecture n’est pas du tout à la hauteur de l’enjeu. Comment imaginer que contrôler davantage les cyclistes permettra de répondre au problème ? Allonger les durées des suspensions de permis ? Cela ne fera qu’augmenter le nombre de conducteurs sans permis. Nous avons au contraire besoin de plus de moyens humains sur les contrôles d’alcoolémie et d’usage de stupéfiants.

La vacance gouvernementale autorise-t-elle les hauts fonctionnaires à sortir de leur neutralité en tenant des propos très politiques ? 

Insinuer que la ville de Rennes créerait un appel d’air pour les migrants avec sa politique d’accueil paraît déplacé lorsque l’on sait que de nombreuses villes, quelles que soient leur couleur politique, font face aux mêmes difficultés. L’Etat n’a-t-il pas sciemment éloigné des migrants de Paris à l’occasion des jeux olympiques? Reprocher à la ville d’accueillir des populations déboutées semble plus qu’inapproprié lorsque l’on sait que la compétence du respect des décisions de justice est bien de l’ordre des services de la Préfecture. Reprendre le discours de l’extrême-droite sur la préférence nationale face aux personnes en difficulté, en hiérarchisant les souffrances, est intolérable. Et surtout, comment préférer contester les chiffres terribles du nombre d’enfants à la rue, attestés par les associations et la Mairie, plutôt que d’apporter des réponses concrètes face à la misère sociale ?

Nous apportons tout notre soutien au Collectif Élèves Protégé-es Rennes, qui a répondu point par point aux contre vérités choquantes du Préfet. 

Sur la santé, les constats sont aussi peu reluisants: les déserts médicaux prolifèrent dans les communes rurales mais aussi dans certains quartiers populaires de villes bretonnes. Au Blosne à Rennes, on ne compte que 4,3 médecins pour 10 000 habitant.es, contre 12,9 en moyenne sur la ville. La ville, elle, a massivement investi dans un nouveau pôle de santé au Blosne. Mais les carences étatiques sont si graves qu’elles ont poussé plus de 50 maires de communes des Côtes-d’Armor à prendre des arrêtés, afin d’enjoindre l’État à agir pour investir dans les services de santé du territoire. 

Après un silence assourdissant de la Préfecture, la seule réponse de l’Etat a été la convocation des maires devant le tribunal administratif, témoignant d’un vrai mépris vis-à-vis d’élu·e·s locaux qui ne font que se battre pour la vie de leur territoire et de leurs habitants. Nous voulons ici encore leur apporter tout notre soutien. Nous demandons à l’État de mettre fin à sa procédure et de se mettre autour de la table, avec les élu·e·s locaux, pour travailler concrètement sur l’accès aux soins pour toutes et tous.

Pour couronner le tout, nous avons eu, comme de nombreux élus locaux en France, des difficultés à digérer les propos de Bruno Le Maire contre les collectivités territoriales accusées d’aggraver le déficit public. Ces déclarations témoignent, au pire d’un réel mépris pour l’échelon local, au mieux d’une méconnaissance de la réalité de l’action publique car nous savons toutes et tous ici que les collectivités sont obligées de voter des budgets à l’équilibre. Par ailleurs, si les collectivités s’endettent, elles le font bien souvent raisonnablement, pour investir dans l’avenir de leur territoire. Ce dénigrement des collectivités n’a pas lieu d’être, car, c’est précisément elles qui sont au plus prêt des besoins des habitants. 

Dans le contexte national d’une austérité budgétaire annoncée, nous, élus locaux écologistes, chercherons à tout faire pour répondre, du mieux que nous pouvons, aux besoins de nos habitants, aux enjeux de la transition écologique et de la justice sociale. 

Mais nous ne pourrons pas tenir la digue indéfiniment face à l’inaction d’un Etat qui doit se remettre au service du plus grand nombre.

Seul le prononcé fait foi