Nous ne sortirons pas ce soir les trompettes et fanfares, mais permettez-nous d’arborer nos plus grands sourires peu visibles sous nos masques et ainsi apprécier ce moment, car il concrétise deux intuitions.
En effet, la décision de ce soir marque ainsi le succès de combats portés depuis les années 80 par plusieurs générations du mouvement écologiste.
À l’instar des grandes villes françaises, Rennes dans les années 60 décide d’adapter la Ville à l’automobile, selon la maxime que l’on prête au Président Pompidou. De multiples projets de parkings, de contournements, de pénétrantes se font jour. Si certains, heureusement sont resté dans les cartons, la couverture de la Vilaine jusqu’au pont de la Mission et l’ouverture des quais en 2X2 voies à la circulation automobile vont profondément transformer la ville et l’orienter vers un modèle conçu pour un monde on l’on pense les ressources infinies, un monde où l’homme omniscient et omnipotent dominant la planète et la nature pouvaient satisfaire tous ses besoins, quels qu’ils soient.
Minéralisation des espaces, bruits, pollutions, embouteillages, circulations piétonnes et cyclistes réduites à la portion congrue, autant d’effets induits que les écologistes n’auront de cesse de décrier et ainsi promouvoir l’enlèvement de la dalle dans tous leurs programmes municipaux. Nous tenons ainsi à rendre hommage à ces militant.es et les équipes regroupées autour des projets portés par Yves Cochet, Nicole Kill Nielsen et Pascale Loget.
Par ailleurs, une seconde intuition a longtemps animé les écologistes. Nous avons toujours pensé que les habitants partageaient cette idée et étaient capables de définir avec les élu·e·s le projet urbain dans le cadre des nouveaux enjeux du réchauffement climatique. La concertation Rennes 2030 a en effet confirmé cet aspect. Les habitants de Rennes et de Rennes Métropole se sont exprimés en faveur d’une ville apaisée, d’une ville redonnant toute sa place à la nature et à son fleuve.
Le travail réalisé par le jury citoyen, composé de 30 personnes provenant de tous les quartiers de notre ville et de différentes communes de la métropole confirme l’intérêt des habitants pour ce projet. Aidés des services, des cabinets Ville Ouverte, Jacqueline Osty et d’Artélia, que nous tenons à remercier, ils ont réussi à appréhender les aspects techniques, financiers et urbains, pour définir un projet adapté aux usages de tous les habitants. Mobilités, éclairage, valorisation du patrimoine et de la nature, lutte contre les îlots de chaleur, animation socioculturelle, le projet du jury citoyen tient compte de toutes les fonctionnalités des espaces urbains. Espace inclusif et accessible, gratuit, car non marchand, sont autant d’ambitions que nous partageons. Preuve une nouvelle fois du travail sérieux et de la capacité des habitants à penser une ville désirable et vivable. Certes, la fermeture des quais sud à la circulation automobile début 2000, puis les changements de circulation avec notamment la vélorue sur les quais nord en 2020 avaient peu ou prou amélioré la situation, mais qui demeure largement insatisfaisante. Les réaménagements prévus par le jury citoyen de la République au Pont de la Mission viennent finaliser un projet resté au milieu du gué. Nous leur adressons à chacune et chacun d’entre eux nos plus sincères remerciements et félicitations.
Les critiques ne vont manquer de se faire jour, alimentées notamment par les craintes des commerçants. Nous ne les balayerons pas d’un revers de main. En tant que défenseurs du commerce de proximité, nous sommes convaincus que la suppression de ce parking est pleinement compatible avec le développement économique. L’ouverture prochaine de la seconde ligne de métro, l’étude de mise en service d’une navette de transport en commun dédiée au centre-ville, ainsi qu’un travail de jalonnement depuis les entrées de ville, sont parmi les réponses qui permettront de renforcer encore l’accessibilité du centre de Rennes à toutes et tous. Par ailleurs, toutes les enquêtes et études commerce démontrent que le panier moyen annuel des piétons, des usagers des transports en commun et des cyclistes est plus important que celui des automobilistes.
En conclusion, il nous faut vous redire notre pleine et entière satisfaction, car la suppression de la dalle soutenant le parking Vilaine et le réaménagement des espaces publics de la République vont transformer durablement notre ville, replaçant la Vilaine, la nature, la biodiversité et les habitants au cœur de notre cité.