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Révision du SCoT : attention à l’obsolescence programmée de nos zones commerciales

Conseil métropolitain du 15 mai 2025 : Intervention portée par Valérie Faucheux au nom des élu·e·s écologistes et citoyen·ne·s
sur la délibération n°5 – Mme Besserve L. : Schéma de Cohérence Territoriale – Modification n°3 – Avis sur le projet soumis à enquête publique

Madame la Présidente, mes chers collègues,

La modification du Schéma de Cohérence Territorial est une délibération importante : elle permet de définir les contours de l’aménagement économique de demain, et de valoriser les projets structurants pour notre territoire. A cette occasion, nous tenons à exprimer notre étonnement face aux grandes disparités entre les trois projets mis en avant. 

Le commerce connaît actuellement d’importantes mutations, impactant autant le commerce de centre-ville que celui des zones périphériques. Tout d’abord, les habitudes de consommation changent : une partie des ménages se désintéressent de ces espaces, car le commerce en ligne permet un accès facilité aux biens de consommation, tout en évitant de se déplacer. 

Selon la dernière étude commerce de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Bretagne, la CCI, en Ille-et-Vilaine, le e-commerce progresse grandement dans le marché des produits non-alimentaires comme dans les secteurs de l’équipement de la personne, et du sport-culture-loisirs. Ainsi, entre 2018 et 2022, les achats non alimentaires sur internet ont connu une hausse de 95%. 

Cela pose plusieurs problèmes : livraisons qui génèrent massivement des émissions de gaz à effet de serre, produits fabriqués de mauvaise qualité dans des conditions sociales et environnementales inacceptables, déchets exportés qui s’accumulent et dont on ne sait quoi faire …. Le dépassement des limites planétaires ne permet plus le maintien d’une consommation infinie, dans un monde aux ressources limitées. 

Autre évolution : l’inflation et la baisse du pouvoir d’achat ont aussi réorienté la consommation vers la seconde main et le réemploi, à la fois plus éthique, plus écologique et plus abordable. Toujours d’après la CCI, en 2022, un quart des achats en ligne de prêt-à-porter concerne des articles de seconde main. La seconde main représente aujourd’hui plus de 10% des achats dans le secteur du textile

Ainsi ces deux dernières années, plusieurs enseignes nationales ont été liquidées, particulièrement dans le secteur de l’habillement, mais aussi de l’ameublement, condamnant de nombreux points de vente aussi bien en centre-ville que dans les centres commerciaux, le tout accompagné de plans sociaux massifs. En dix ans, selon l’Alliance du Commerce, le secteur a perdu plus de 37 000 emplois dans l’indifférence la plus totale. Les grandes surfaces spécialisées ainsi que les centres commerciaux commencent, eux aussi, à montrer des faiblesses. Preuve en est,  la célèbre enseigne suédoise d’ameublement a annoncé pour la première fois la baisse de son chiffre d’affaires depuis qu’elle s’est implantée en France. Sur notre territoire, Cap Malo, ou encore la Route du Meuble montrent aussi des signes de perte de vitesse. 

II est donc temps de repenser les espaces uniquement dédiés aux activités commerciales en tenant compte de ces mutations, des besoins des habitants et de l’adaptation aux enjeux climatiques et socio-économiques qui en découlent. Il nous faut éviter l’obsolescence programmée de ces zones, tel qu’on l’a vu pour le mail commercial construit route de Lorient : à  peine construit, il est déjà dépassé !

D’autre part, il s’agit d’un modèle d’aménagement éloigné des enjeux de sobriété foncière et de préservation des terres agricoles que nous mettons pourtant au cœur de nos documents d’urbanisme. 

C’est pourquoi nous exprimons de sérieuses interrogations quant au modèle de développement de la zone commerciale des Touches. En effet, le Programme Local de l’Aménagement Économique, le PLAE, prévoit de densifier le bâti et de sanctuariser les zones économiques pour de l’activité productive, ce qui n’est pas dans les orientations du projet de Pacé. Le modèle Open Sky n’était pas le bon, et nous ne sommes pas satisfait de ce qui se dessine pour cet espace. De plus, une fois construit, il sera déduit de notre compteur pour parvenir à une trajectoire Zéro Artificialisation Nette. A l’heure où le foncier se raréfie fortement, chaque projet doit être soigneusement réfléchi.

Pour autant, il est possible d’envisager d’autres manières de faire, d’autres façons de construire, en commençant par réinterroger l’existant. C’est le cas des projets de Cleunay ainsi que celui de la ZA Nord. Concernant cette dernière, nous saluons un important travail de renouvellement. Le changement de son nom pour “Côteau de l’Ille” nous rappelle son passé hydrologique. On peut ainsi noter d’importantes parts de végétalisation. D’un point de vue commercial, c’est un projet qui se détourne de l’urbanisme mono-fonctionnel : la mixité des usages est au programme, pour transformer cette zone en quartier, en lieu de vie. Si on note l’extension de surfaces commerciales, nous saluons l’intégration du commerce de proximité, de l’artisanat. 

Il faut aussi souligner la place dédiée aux associations, et à l’économie sociale et solidaire, au réemploi. Avec la construction de nouveaux logements, le futur de la ZA nord va finalement dans le sens de la ville du quart d’heure que nous portons. Il s’agit d’un projet important, qui de par son emplacement privilégié, à l’entrée de Rennes et de Saint-Grégoire, a tout pour réussir. Nous le souhaitons.

Pour terminer, nous ne nous opposerons pas à cette modification du Schéma de Cohérence Territorial : elle intègre des éléments positifs que nous tenions à souligner, montrant la transition nécessaire entre un modèle d’aménagement ancien et dépassé, et un nouveau modèle à inventer. Allons vers des espaces de vie plus diversifiés qui permettent réellement de maintenir des activités commerciales, des emplois adaptés aux besoins des habitants et à l’habitabilité de nos territoires. Nous estimons néanmoins qu’en l’état elle manque encore, paradoxalement, de cohérence. 

– Seul le prononcé fait foi –