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Jeunesse en détresse, jeunesse en action : un engagement politique crucial

Conseil municipal du lundi 24 mars 2025 : Intervention de politique générale portée par Laurent Hamon au nom des élu·e·s écologistes et citoyen·ne·s.

Madame la Maire, chèr·e·s collègues,

Ce soir, au nom des écologistes, je souhaite évoquer quelques-uns des défis auxquels la jeunesse est confrontée. Ces enjeux sont au cœur de nos préoccupations, et les délibérations de ce soir portées par nos collègues à l’enfance et la jeunesse témoignent de l’engagement de la Ville pour les enfants et les adolescents. Mais la Cour des comptes a récemment pointé les incohérences des politiques gouvernementales à destination de la jeunesse. Nous en avons l’illustration très concrète à Rennes avec la suppression attendue des binômes de la prévention pourtant mis en place par l’Etat en janvier 2019 afin de lutter contre la violence et la délinquance des jeunes par des mesures de prévention.

Nous le savons tous, la présence éducative sur l’espace public, notamment celle des éducateurs de rue, joue un rôle essentiel dans le quotidien des quartiers populaires. Ils et elles sont sur le terrain, aux côtés des jeunes et leurs familles, pour les accompagner dans l’accès au droit et renouer avec eux lorsque le décrochage social et scolaire se fait sentir. Et pourtant, l’État a fait le choix  d’abandonner le soutien au dispositif, alors que celui-ci venait à peine d’être mis en œuvre dans notre ville. Conséquence directe : la suppression de quatre postes d’éducateurs spécialisés dans les quartiers de Villejean et Maurepas.

Par esprit de responsabilité envers les habitants des quartiers populaires mais aussi des associations qui portent ces dispositifs, notre collectivité va faire son possible pour compenser en partie cette perte. 

Nous avons aussi eu écho de la volonté de supprimer les postes adultes relais mettant dans l’angoisse nombre d’associations et de collectivités. À Rennes par exemple, ce sont tous nos médiateurs et médiatrices à l’école qui reposent sur ce dispositif. Cette mesure a heureusement été abandonnée, sûrement devant les remontées angoissées du terrain et de l’Education nationale.

Les études sont pourtant claires, les alertes totalement lisibles. Les jeunes délinquants sont avant toute chose, des jeunes en danger. Les profils des mineurs entrés dans le trafic sont limpides : ils sont avant tout en décrochage scolaire ou en voie de l’être. Ils sont issus souvent de milieux familiaux déstructurés. Une partie d’entre eux a une notification MDPH. Ils sont en grande vulnérabilité sociale et scolaire et sont des proies faciles pour le trafic organisé. Ces parcours abîmés sont le fruit de notre échec collectif à prévenir l’entrée en délinquance ou, tout simplement, à donner le choix aux jeunes, notamment aux garçons des quartiers populaires, de se projeter dans un avenir social, professionnel, citoyen digne.
Et si la lutte contre la délinquance ne peut se faire sans un volet répressif et les sanctions judiciaires associées, la prévention, le travail social, une politique d’accompagnement à la parentalité qui ne méprise ni ne discrimine les parents des quartiers, doivent être l’autre jambe de la politique de lutte contre la délinquance.

Mais nous savons désormais que l’Etat a depuis longtemps fait le choix d’une politique unijambiste. Et si les appels à projet comme celui qui se déploie sur notre ville, le projet Limit’s, ont le mérite d’exister, ils ne peuvent remplacer les moyens de droit commun.

Sur ce sujet, comme de nombreux autres, nous ne pourrons malheureusement pas indéfiniment nous substituer à l’État. Et les allers-retours, les stop and go, l’incertitude des financements annuels ne sont qu’une fragilisation permanente de ce travail qui doit pourtant s’inscrire avec les habitants, notamment avec les enfants et les adolescents dans le temps long.

Maintenant, qu’en est-il de la santé mentale des jeunes ? 

Quartiers populaires ou pas d’ailleurs, la jeunesse est en souffrance. Les rapports sur la santé mentale des enfants et des adolescents, alertent de plus en plus sur cette souffrance croissante. Déjà en sortie de Covid, les médecins alertaient sur les dépressions, les troubles, les tentatives de suicide allant croissants, notamment chez les jeunes filles. L’an dernier, nous avons organisé les États généraux de la santé mentale ici, à Rennes. Ce que nous avions constaté à l’époque ne fait que se confirmer aujourd’hui, avec la publication du récent baromètre annuel sur le moral des adolescents. Au niveau national, les chiffres sont alarmants : 45 % des jeunes souffrent d’anxiété, 40 % présentent des symptômes dépressifs et 72 % se disent épuisés. Et, nous le savons depuis longtemps, c’est en Bretagne, qu’il y a le taux de suicides le plus élevé chez les jeunes.

Bretagne, terre de réussite scolaire certes. Mais cette réussite est largement corrélée à une pression importante sur les élèves. Pression fortement accrue par un système d’évaluation permanente et ce désormais, dès la maternelle, et largement aggravée par le système Parcoursup. À cela s’ajoutent les séquelles de la pandémie de COVID-19 déjà évoquée. La souffrance mentale des jeunes atteint des niveaux critiques. Nous ne pouvons pas rester les bras croisés face à cette détresse grandissante ! Il est urgent d’investir massivement dans la santé mentale des adolescents.

Mais une fois encore, où sont les moyens promis par le gouvernement ? Les délais pour consulter un psychiatre demeurent trop longs, la pédopsychiatrie manque de soignants, de lits, de structures où accueillir. La médecine scolaire est en déshérence et les soignants à l’école se font rares. En attendant, les consommations d’alcool et de drogues toujours plus fortes explosent chez les jeunes.

Alors, à notre échelle, notre collectivité agit, en développant des lieux d’accueil et des services publics où ils peuvent être écoutés, accompagnés, se détendre et retrouver du bien-être. Nous savons aussi pouvoir compter sur un riche maillage d’associations et de professionnels de la jeunesse mais aussi de santé, dont nous saluons l’engagement.

Et puisque nous parlons d’engagement, nous en avons eu une belle illustration la semaine passée, avec le festival Nos futurs, porté par le journal Le Monde et soutenu par notre métropole depuis maintenant 3 éditions.

Car en dépit de toutes ces difficultés, il y a aussi une formidable énergie dans cette jeunesse, qui n’est pas que celle du désespoir. Cet événement a donné à voir, à travers des débats et des ateliers, des jeunes en mouvement et qui ont prouvé qu’ils ne sont pas simples spectateurs du monde en transformation. Ils veulent être tout simplement des acteurs du monde de demain. 

À l’heure du bouleversement climatique qui s’annonce, et qui a déjà commencé, à l’heure où nous leur promettons la guerre et leur demandons de se préparer au futur conflit mondial, il est impensable d’ignorer leurs réalités.

Et c’est ça, le message que nous devons retenir, chers collègues. Nous avons une responsabilité immense vis à vis des jeunes : celle d’être à leur écoute, d’être présents à leurs côtés, sur le terrain, prêts à ajuster nos politiques, à répondre à leurs besoins et à valoriser leur potentiel, pour que leur avenir soit à la hauteur de leurs rêves.

Je vous remercie,

– Seul le prononcé fait foi –