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Les écologistes veulent un accueil digne et dénoncent le projet de loi asile et immigration du gouvernement

Conseil municipal du 18 septembre 2023 · Prise de parole des élu·e·s écologistes et citoyen·ne·s portée par Gaëlle Rougier sur la délibération n°52 : Relations internationales – Initiative Citoyenne Européenne (ICE) « Garantir un accueil digne des migrants en Europe » – Soutien

Quels que soient les rangs politiques sur lesquels vous siégez au sein de cette assemblée municipale, vous n’êtes pas sans savoir la réalité de centaines de personnes exilées à Rennes actuellement, comme dans de nombreuses autres villes de France.

A Rennes au campement des Gayeulles, chaque année depuis maintenant 3 ans, les campements de fortune fleurissent aux beaux jours. 

Des centaines de personnes, parmi lesquelles des femmes avec des enfants, parfois nourrissons, des personnes âgées, parfois en situation de handicap ou malades, se retrouvent à la rue, dans un dénuement et une indignité totale des conditions de vie, faute de lieux et de places dans les dispositifs d’hébergement d’urgence.

En dépit d’un volontarisme historique de notre Ville qui met à l’abri ici à peu près un millier de personnes, soit autant que l’Etat français déconcentré, dont c’est pourtant la compétence directe, nous ne pouvons plus faire face à la réalité d’un nombre constant de familles et de personnes exilées qui, en dépit de conditions d’indignité totale qui leur sont faites sur le territoire français, arrivent dans l’espoir de conditions de vie meilleures, lorsqu’il ne s’agit pas tout simplement de survie.

Ces familles, que rien ne fera renoncer à un départ pour fuir la guerre, la sécheresse, la famine ou la répression politique dans leur pays, sont là et bel et bien là. Nous accueillons leurs enfants dans nos crèches, nos écoles, aux collèges et lycées. Ils sont dans notre ville, parents d’élèves investis et très attachés à la scolarité de leurs enfants, l’école étant un repère universel de stabilité et d’espoir d’ascension sociale. Ces familles nouent des liens d’amitié avec les autres familles, elles participent à la vie associative et, dans certains cas, l’un d’eux travaille de façon légale ou pas d’ailleurs, dans les fameux métiers en tension que l’on évoque souvent.

Elles sont peu nombreuses en France au regard du nombre de migrants qu’accueille l’Allemagne chaque année, une Allemagne tournée vers l’avenir et moins engluée que nous dans un dogmatisme très français autour des questions de migrations, doublé d’une course vaine et désespérante et derrière l’électorat du Rassemblement national.

Pour autant, aussi peu nombreuses qu’elles soient, on ne se donne pas les moyens de les accueillir correctement et in fine de leur permettre de s’installer et de travailler sur le sol français lorsqu’elles ne demandent que cela, aux côtés d’ailleurs d’un certain nombre, pour ne pas dire d’un nombre certain, de chefs d’entreprise de notre pays.

C’était d’ailleurs l’objet de cette tribune sur l’emploi des personnes exilées qui doivent pouvoir être régularisées lorsqu’elles travaillent ou veulent travailler, tout en assurant le regroupement familial et les droits sociaux, bien évidemment.

Cette initiative de l’ICE, née à l’origine d’une mobilisation de collégiens rennais et portée puis relayée par notre Ville au sein des instances européennes, est aussi le fruit de cet engagement ancien de Rennes et de ses habitants et habitantes pour l’accueil inconditionnel et que nous portons désormais collectivement avec d’autres villes au sein du réseau de l’ANVITA.

Cette initiative fait d’autant plus sens que le contexte législatif national et européen autour de l’accueil des personnes exilé·e·s se durcit.

Au niveau national d’abord, le projet de loi « Immigration, intégration, asile » doit être débattu dans les prochains mois au Parlement. C’est la 29ème loi immigration présentée depuis 1980 soit un rythme tous les un an et demi ; c’est semble-t-il le passage obligé de tout ministre de l’Intérieur qui veut « imprimer sa marque » sur un sujet instrumentalisé depuis plusieurs décennies. 

Le gouvernement va donc déposer un énième projet de loi sur l’immigration avec toujours plus de restrictions de droit et de répression à la clé, pour détourner l’attention de la crise sociale et démocratique. Le premier passage en commission du Sénat a renforcé nos craintes sur ces injonctions haineuses qui remettent en cause en passant le code de la nationalité et dérogent aux traités européens.

Sans exhaustivité, les personnes pourront être expulsées plus rapidement, les jeunes majeurs non accompagnés pourront être reconduits à la frontière et ce même s’ils bénéficient d’un suivi de l’ASE depuis des années. C’est aussi le retour de la suppression de l’Aide Médicale d’Etat, qui avait déjà mobilisé le milieu hospitalier et les épidémiologistes appelant à garder raison devant les risques en matière de santé publique que cette mesure induisait. Sans oublier la double peine avec une proposition d’expulsion du pays à l’issue d’une peine de prison supérieure ou égale à 10 ans, comme s’il était naturel de voir punir une seconde fois par l’expulsion une personne qui aurait déjà fait sa peine et qui aurait tout de même une famille et des enfants potentiellement en france.

La régularisation introduite dans l’article 3, permettant l’obtention d’un passeport Métiers en tension, se fera selon des critères très restrictifs. Les associations estiment à quelques centaines, au mieux un millier de personnes concernées par ce passeport. Pour l’obtenir les personnes déjà en emploi devront arguer d’un contrat de travail illégal, dénonçant au passage son employeur, c’est vous dire le sérieux de cette proposition.

Pendant ce temps, les entreprises continueront à avoir des difficultés de recrutement, étudiants et salariés continueront à se heurter à une administration arbitraire et tatillonne, les problèmes de logement et d’insertion sociale ne seront pas résolus. Le gouvernement veut donc une fois de plus alimenter les peurs et continuer de fabriquer des situations administratives ubuesques pour les personnes exilées qui vivent dans la peur permanente de la reconduite à la frontière, renforçant la fabrique de personnes sans-papiers par les lois françaises. 

La précarisation organisée des personnes exilé·e·s est une hypocrisie politique et ne permet pas d’aborder sereinement la question des migrations avec une partie de nos concitoyens. 

Nous écologistes proposons de mettre en place une Convention citoyenne sur les migrations comme le réclament de nombreux acteurs de la société civile, plutôt que d’agiter l’idée d’un référendum sur l’immigration, vieille revendication de l’extrême-droite française. Cette Convention citoyenne sur les migrations pourrait dégager, dans un cadre apaisé et documenté, une analyse partagée de la migration, de ses succès comme de ses échecs, pour une fois dégagée d’une instrumentalisation à des fins politiques qui renforcent les divisions de notre société.

La vision réaliste et dépassionnée qui émergerait de cette Convention citoyenne des Migrations pourrait peser dans le contexte européen, où Le Pacte Asile et immigration, qui devrait être adopté avant les élections européennes de juin 2024, est sous tendu sous-tend lui aussi à la fois par une vision répressive et utilitariste de l’immigration, poussée par les forces politiques réactionnaires et pyromanes. 

Les morts quotidiennes des personnes migrantes aux frontières de l’Europe doivent nous rappeler à défendre une vision qui tient compte des réalités des migrations et d’un respect inconditionnel des droits humains.

Seul le prononcé fait foi