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À la une Conseil municipal Gaëlle Rougier

Il faut loger les exilé.e.s

[Conseil municipal du 16 septembre 2019]

 

Co-présidente du groupe écologiste à la Ville de Rennes


Vice-présidente de Rennes Métropole en charge de la Jeunesse

Intervention de Gaëlle ROUGIER au nom du groupe écologiste  et citoyen

Depuis le 9 juillet à Rennes des personnes exilé.e.s dorment aux Gayeulles. Le campement de fortune n’a cessé depuis de grossir pour devenir, à notre désarroi à toutes et tous, le premier bidonville de Bretagne. Alors que les dernières cités d’urgence ont fermé à Rennes dans les années 80, nous connaissons une régression sans précédent dans l’histoire de notre ville de l’accès à l’hébergement d’urgence. Cette situation qui s’enkyste dans notre ville, nous fait honte et nous emplit de tristesse et je pèse mes mots.

Parmi ces personnes exilées on compte de nombreuses personnes malades, dont certaines ont des pathologies lourdes, on compte aussi beaucoup d’enfants. Ils vont à l’école le jour, parfois font le chemin jusqu’au Blosne pour certains et rentrent le soir dormir dans des conditions inimaginables.  À ce jour, 26 enfants sont scolarisés, 17 ne le sont pas encore et 15 ont moins de 3 ans pour l’instant. La scolarisation, l’accès à la cantine, aux centres de loisirs de la ville sont primordiaux pour ces enfants. D’abord parce que prosaïquement, ils peuvent manger, avoir chaud et se sentir en sécurité, se faire des camarades dans un semblant de normalité, au moins en journée. Nous nous réjouissons qu’ils puissent au moins trouver ce réconfort tout relatif.

La Ville a aussi permis l’installation de toilettes sèches, a assuré l’accès à l’eau à l’aide de citernes, a assuré l’accès aux douches municipales et très difficilement à celles du camping, mais la situation sanitaire reste très préoccupante sur le campement.

La responsabilité de cette situation est très claire, elle est celle de l’État qui refuse depuis début juillet de prendre en charge les demandeurs d’asile.

Mais las de rappeler sans cesse que cette situation n’est pas de notre fait, nous perdons notre temps à espérer quoi que ce soit du gouvernement actuel en matière d’hébergement d’urgence, dont les places se sont réduites au fil du temps. Les communes de France, ne peuvent plus se contenter d’être les victimes passives de l’incurie nationale qui les laisse volontairement, notamment celles qui ont fait le choix d’accueillir dignement, se dépêtrer de ces situations devenues inextricables. Le réseau national des villes accueillantes doit être une caisse de résonnance politique de cette réalité de terrain.

La question de l’accueil digne des personnes exilées pose bien le rôle des villes et des métropoles face à l’État. Nous ne pouvons plus tenir le discours du « on n’y peut rien » à moins d’organiser nous-même notre propre incompétence. Nous ne pouvons plus nous reposer ainsi sur des associations ou des collectifs de militants épuisés physiquement et moralement. Nous ne donnons pas dans le caritatif. Nous sommes avec l’État, nous les collectivités, les garants de l’État providence et des valeurs républicaines d’égalité et fraternité.

Il faut une offensive concertée des villes face à l’État. Comme pour les pesticides ou d’autres sujets, il faut poser un rapport de force avec l’État et revendiquer notre pouvoir d’agir.

Des solutions commencent à se faire jour avec une cinquantaine de places dans 15 logements de différentes communes de la métropole et grâce à l’implication de quelques promoteurs immobiliers et de la mobilisation des bailleurs sociaux. Cette solidarité métropolitaine est indispensable mais doit s’amplifier. Les communes doivent être accompagnées dans ces démarches et dans l’accompagnement social des personnes.

De façon immédiate, seule l’ouverture de certains de nos équipements publics peut permettre de mettre ces familles et ces personnes à l’abri. Il faudra également rapidement aller vers des logements légers, modulaires, qui permettent au moins la mise à l’abri des personnes sous un toit et au chaud. Il faut trouver dans l’exemple d’autres villes ou d’autres pays qui développent des logements alternatifs de ce type.

Si nous ne mettons pas en œuvre des solutions concrètes rapides, nous n’aurons d’autres solutions à Rennes que de mettre en œuvre à Rennes un camp aux normes HCR, comme l’a fait Damien Carème dans sa ville de Grande-Synthe, mettant ainsi l’État face à ses responsabilités et l’obligeant à prendre position et à agir.

Enfin, si ces personnes se retrouvent dans cette situation c’est bien que l’État mène une politique hostile aux migrants, quels que soit leurs statut désormais, même les demandeurs d’asile. Pourtant la régularisation de la plupart d’entre elles leur permettrait non seulement de se loger mais de travailler, de vivre dignement et d’y élever leurs enfants ici à Rennes, ou ailleurs.

Seule la volonté de l’État de ne pas accueillir ces personnes explique leur situation désespérée. Pourtant leur régularisation permettrait l’obtention d’un titre de séjour, même temporaire, qui changerait tout.

En attendant, à nous d’être à la hauteur des valeurs qui nous animent au sein de cette municipalité et qui animent la majorité des habitant.e.s de cette ville.