Conseillère métropolitaine
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Intervention de Valérie FAUCHEUX au nom du groupe écologiste et citoyen
En préambule, nous voulons revenir très brièvement sur le lien inévitable entre les orientations budgétaires que nous définissons – et qui concernent au final l’ensemble des habitant·e·s de la métropole – et les mesures gouvernementales qui impactent directement la collectivité. La « contractualisation » (pour ne pas dire l’encadrement pur et simple) imposée par le Gouvernement aura, nous le voyons déjà ce soir, des effets directs sur nos dépenses de service public. En limitant la hausse des dépenses à 1,3%, nous allons maintenant être obligés de rogner sur la qualité de nos services. Et ce capage est d’autant plus catastrophique que certaines dépenses augmentent nécessairement, sans que nous soyons à l’origine des décisions : je veux parler des fluides, des carburants et des matières d’œuvre…
Cependant, pour atténuer ces propos, il faut noter que la santé financière de Rennes métropole reste bonne. Les mesures gouvernementales impacteront moins notre territoire que d’autres plus en difficultés grâce aux dynamismes démographique et économique dont nous bénéficions.
Dénoncer, même en filigrane, la politique gouvernementale n’est pas, évidemment, pour nous déplaire. Mais cela revient à dénoncer ce que l’on s’applique à soi-même depuis 2014. En effet, depuis 2014, notre doxa majeure repose sur une réduction des dépenses de fonctionnement pour, je cite le rapport, « conserver le niveau d’épargne suffisant et augmenter notre capacité à nous désendetter ».
L’ennui est que les premières victimes de ces décisions sont les personnels de notre collectivité… Ceux-là même qui mettent en œuvre les politiques dont nous nous enorgueillissons lors de nos conseils, dont nous nous félicitons régulièrement dans la presse. Depuis 2014, l’augmentation de la masse salariale s’explique essentiellement par les effets des transferts de compétences, les mutualisations et les mesures nationales, type RIFSEEP, PPCR… Et trop rarement par des créations de postes. Ce jeu de vases communicants ne fait que masquer le fait que nous avons constamment utilisé les services et les agents comme variables d’ajustement. Mais la réalité, c’est que nos services sont aujourd’hui en surchauffe. Et c’est pourtant sur eux que nous faisons reposer nos ambitions.
Nous constatons que les conditions de travail se dégradent : accumulation des dossiers urgents, calendrier d’opérations qui se bousculent, réunions après réunions, la pression essore les agentes et agents de notre collectivité et ce, quels que soient leurs grades et leurs fonctions. Nous constatons une augmentation des arrêts de travail qui par ailleurs ne sont pas remplacés. Nous prenons donc le risque de voir partir des professionnel·le·s compétent·e·s et expérimenté·e·s. Ce sont eux qui mettent en œuvre nos politiques. Nous nous devons de leur porter toute notre attention et notre vigilance, et d’attribuer aux différents services les moyens d’agir. Cette politique d’austérité à laquelle nous nous sommes contraints est parfaitement contraire aux besoins de notre territoire et de nos concitoyens.
Venons-en aux orientations concrètes de ce rapport.
Sur le Plan Climat Air Energie Territorial, qui doit nous conduire à un territoire zéro carbone et 100 % énergie renouvelable à l’horizon 2050, nous partageons évidemment ses objectifs. Mais nous sommes obligés de le redire encore, les moyens adossés à ce plan ne sont pas à la hauteur. Vous nous annoncez une enveloppe de 58 millions par an, c’est largement insuffisant au regard des enjeux. Quelques exemples : le PCAET prévoit 6 000 réhabilitations de logement par an en 2024. Notre Métropole annonce aujourd’hui qu’elle y contribuera à hauteur de 10 millions d’euros par an. Mais le coût pour une telle ambition est de 200 millions d’euros par an ! Notre collectivité financera donc la réhabilitation de logements à la hauteur d’à peine 5 % des besoins. Bien sûr, c’est une compétence qui relève en premier lieu de l’État, et qui fait l’objet de financements de plusieurs parties prenantes, mais il est d’ores et déjà clair que l’engagement actuel de la Métropole ne permettra pas de créer un véritable effet de levier pour massifier les réhabilitions énergétiques sur notre territoire.
D’autant que dans le même temps, nous affichons l’ambition de parvenir à rénover 25 % des surfaces de bâtiments tertiaires (publics et privés) d’ici 2030. Et là encore, les moyens financiers et humains prévus ne sont pas à la hauteur. Comment allons-nous soutenir les communes et le tissu économique local dans cette transition ?
À l’heure où les acteurs du territoire sont toujours plus nombreux à être prêts à s’engager dans de véritables changements, il nous faut accompagner toutes les bonnes volontés. Et cela passe nécessairement par du soutien financier et des moyens humains.
Encore une fois, nous partageons les objectifs de transition écologique qui ont été fixés. Nous les partageons d’autant plus qu’ils sont particulièrement ambitieux, mais il faut les moyens dédiés pour tenir nos engagements. Il nous faut aussi établir un budget carbone, à l’image de ceux établis par d’autres collectivités d’Europe, qui permettent de passer au crible de la transition énergétique l’ensemble des politiques publiques que nous menons et ainsi d’évaluer leur impact positif ou négatif, et le cas échéant de les amplifier ou les réorienter.
Encore une fois, nous appelons à une plus forte mobilisation sur ces enjeux.
Nous avons plus besoin de rénovation énergétique que d’une future arena, chargée encore cette fois-ci, je cite le rapport, « d’asseoir le positionnement et le rayonnement de la métropole ».
Nous pensons nécessaire, face aux incertitudes financières, de recentrer nos investissements vers les politiques qui concernent les habitants du territoire.
En ce qui concerne les investissements, nous déplorons, à la lecture de ce rapport, un réel manque de visibilité sur la programmation pluriannuelle d’investissements. Nous avons besoin de données rassemblées, par mission et par année et sur la période qui aujourd’hui est au centre de toutes nos réflexions PLUI, PDU, Schéma directeur RCU, STEP… c’est-à-dire 2030. Cet outil, qui n’a pas été réactualisé depuis septembre 2015 est nécessaire pour éclairer nos décisions.
De plus, concernant le financement de notre développement, nous tenons à rappeler notre détermination à revenir à une économie réelle, en n’empruntant plus sur le marché obligataire. Pour le dire plus simplement, les marchés boursiers, soumis aux aléas de la finance, ne peuvent de notre point de vue pas faire irruption dans nos orientations budgétaires. C’est par l’emprunt public, sécurisé, que nous devons financer notre développement.
Enfin, nous voulons une fois de plus réinterroger la question de l’attractivité et du rayonnement, comme seul horizon de réflexion de développement du territoire. Cette question ne peut pas s’imposer à nous, comme une fatalité. Or une partie de nos politiques tendent à renforcer l’attractivité de l’aire urbaine rennaise sans qu’aucune réflexion ne soit menée sur les effets pervers.
À force d’attractivité et de rayonnement, il est évident que les déséquilibres d’aménagement du territoire vont se renforcer, conduisant inévitablement à la paupérisation de zones dites plus « périphériques », tant à l’échelle départementale que régionale.
Le débat doit avoir lieu. L’État refuse de l’engager, c’est à nous, grande métropole, en solidarité avec les territoires en proximité et leurs habitant·e·s, que revient cette responsabilité. |