Monsieur le Président, chèr-e-s collègues,
Le SDAGE, Schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux, est un outil majeur de planification de la politique de l’eau sur le bassin Loire Bretagne. Issu d’une concertation avec tous les acteurs du bassin hydrographique Loire-Bretagne, il constitue un véritable programme de reconquête de la qualité de l’eau. Il fixe des objectifs, des échéances, des orientations et des dispositions juridiques réglementaires et financières pour y parvenir. Il est le prolongement de la Directive cadre sur l’eau adoptée à l’unanimité par le Conseil et le Parlement européen en 2000. L’objectif de cette directive est d’atteindre le bon état chimique et écologique de toutes les masses d’eau de l’Union européenne : cours d’eau, plans d’eau, eaux souterraines, eaux estuariennes et littorales, entre 2021 et 2027.
Un levier indispensable pour améliorer la qualité de l’eau
Pour ce faire, le précédent SDAGE avait établi un plan de montée en qualité : 2015, 60 % des masses d’eau devaient avoir retrouvé un bon état. La réalité des chiffres est loin du compte : seules 30% des masses d’eau du bassin ont atteint l’objectif. Les acteurs économiques et institutionnels renâclent, reportant d’année en année la mise en œuvre des préconisations. Et pourtant, 2027 arrive à grands pas.
Malgré ses insuffisances, le groupe des élu-e-s écologistes de Rennes Métropole estime que ce programme issu d’un compromis entre différentes parties aux intérêts divergents, voire contradictoires, reste cependant le meilleur levier à l’heure actuelle de notre politique de reconquête de la qualité de l’eau. Et chacun doit y prendre sa part, en responsabilité.
Une gouvernance à rééquilibrer
Aussi concernant les remarques faites par notre Métropole sur la gouvernance du SDAGE, nous sommes d’accord pour constater que la représentation des différents acteurs présente pour l’instant un déséquilibre flagrant. Le milieu agricole y garde une place prépondérante, pour une redevance sans commune mesure avec ce qu’elle devrait être si l’on appliquait réellement le principe de pollueur-payeur, et qui met en péril l’équilibre entre intérêts corporatistes et intérêt général.
Nous approuvons pleinement la demande faite au SDAGE d’affirmer plus clairement son soutien à l’agriculture biologique.
Par contre nous tenons à relever l’ambiguïté de certaines des remarques faites au nom de Rennes Métropole.
Nous ne pouvons pas nous exonérer de l’application de la réglementation en matière de rejet de phosphore, au prétexte que ce sont les agriculteurs qui sont responsables en tout premier lieu et non nos stations d’épuration. L’implication de notre agglomération, par ses actions dans le domaine de l’assainissement et par le biais de la CEBR dans les plans de protection de la ressource doit permettre, dans le dialogue avec les exploitants agricoles, de fixer une feuille de route précise et réduire les intrants.
Préserver coûte que coûte les zones humides
Concernant les zones humides, nous ne pouvons qu’exprimer un fort désaccord. Oui, les mesures de compensation sont très contraignantes, particulièrement en milieu urbain. Non, la notion de zone humide ne peut varier selon les territoires. Elles font l’objet d’une définition précise par arrêté ministériel. Parce qu’elles sont rares, parce qu’elles permettent de limiter la température en ville, donc le réchauffement climatique, parce qu’elles renferment une grande diversité faunistique et floristique, parce qu’elles favorisent la perméabilité des sols et donc la lutte contre les inondations, il nous faut absolument les préserver tout en les reliant par des corridors écologiques. Les règles de compensation ne peuvent connaître de dérogations perpétuelles. À nous d’adapter nos projets d’urbanisme à la réalité écologique de nos communes. C’est d’ailleurs, ce que les élus des communes de notre agglomération ont affirmé dans le SCOT du Pays de Rennes adopté le 29 mai dernier. Je vous renvoie au thème n°6 du document d’orientation et d’objectifs. Il est clairement précisé page 35 que « les maîtres d’ouvrage de projets d’aménagements et d’urbanisme devront identifier et protéger dès la conception de leur projet, toutes les zones humides et cours d’eau. Dès lors que la mise en œuvre d’un projet, conduit (…) à faire disparaître ou dégrader le fonctionnement de zones humides, des mesures compensatoires devront être prises ». Nous ne pouvons être à l’origine de telles contradictions.
Ne pas regrouper les plans d’eau
Enfin, concernant la création de plans d’eau, nous sommes favorables aux dispositions prévues par le projet de SDAGE, et ce même si cela nous oblige à repenser le projet Vilaine-Aval. Cette préconisation a un rôle en terme écologique. En effet, regrouper les plans d’eau, c’est augmenter l’évaporation et amoindrir la ressource et la biodiversité. Entre zone de loisirs et dérèglement climatique, faudrait-il choisir ?
Le véritable enjeu et notre responsabilité commune sont bien de fournir une eau de qualité aux habitants actuels et futurs de Rennes Métropole. Les tergiversations sur Vilaine Aval ne doivent pas nous faire perdre de vue l’essentiel.
Soyons solidaires, vraiment
Une grande partie des réserves émises atteste d’une vision de type égocentrée de notre territoire au regard des enjeux. En effet, rappelons que plus des 2/3 de l’eau potable consommés par les habitants proviennent de territoires extérieurs à l’agglomération. Reporter les contraintes sur ces territoires desquels nous dépendons sans assumer celles qui nous reviennent, c’est fragiliser les solidarités dont nous avons aussi besoin.
À l’heure où le SDAGE est attaqué de toutes parts par divers lobbies dont les chambres d’agriculture, de commerce et d’industries, ce qui peut conduire à la révision des ambitions politiques affichées, il aurait mérité que notre conseil le soutienne, et ce sans exception. On note dans le même temps, la participation massive de citoyens au débat public qui a été particulièrement forte en Bretagne, affirmant la nécessité d’un changement radical de politique de l’eau.
Il y a urgence pour notre territoire à garantir notre approvisionnement en eau potable, sans devoir investir davantage dans les procédés de filtration, ce qui alourdirait la facture des abonnés. C’est pourquoi nous voterons le vœu proposé. Néanmoins, nous regrettons le vote global qui nous est proposé. Celui-ci inclut dans une même délibération le soutien aux objectifs du SDAGE et l’expression de réserves auxquelles nous sommes fortement opposés. |